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Non. Vous êtes dans ce train.
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 Article publié le 2 novembre 2014.

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Non. Vous êtes dans ce train. Il file vers vous ne savez quelle autre histoire. Le décor de campagne défile, inconscient de toute votre déroute. Vous êtes assis, sans rien avoir à rajouter...
Plus besoin de tenir à rien, ni de trop se lier avec la compagnie.
Il règne dans ce compartiment cette douce froideur des êtres accoutumés à se frôler mais que rien ne lie. C’est toujours ce même refrain.
Un remords trop vif serait pour vous comme un soupir indiscret. Vous avez face à vous le paysage en train de filer dans une lumière du soir inquiétante...
Tout se superpose dans un paix bientôt vaincue par l’obscurité. À vous alors de savoir remettre au reste toute votre tristesse, de l’envoyer au loin avec la nuit bientôt totale. Les personnages que vous vous apprêtez à retrouver, ou ceux que vous venez de quitter sans retour... le train file toujours. Autour de toi les autres passagers, extérieurs à ton émotion, paraissent des mannequins.
Par plusieurs couches d’obscurité. Tout le ciel se rend plus épais. Comme aussi solide qu’une peinture à la détrempe.
Couleur d’un décor propice aux apparitions.
Des fantômes dans le ciel. Des nuages aux formes plus capricieuses. Des êtres fugitifs aussitôt aperçus aussitôt dissipés, fumerolles évanouies sur l’air noir.
Un ciel qui dans sa glace suspendue d’ombres et d’étoiles vous signale votre solitude, vous en pointant le mystère...
Un soir de retour à ne pas vouloir être dérangé dans le cours de sa pensée paisible.
Il va falloir le tenir, le fil de sa pensée. Comme cela. Sans arrêt.
C’est quelque chose qui a lieu dorénavant.
 Sur les années les décennies.
Ne pas le perdre. Alors qu’on sombre par fréquence dans le sommeil... mais cela ne retire rien à la sorte de concentration dont l’esprit doit toujours faire montre pour ne pas se perdre.
Ne pas perdre ce fil précis. Cet élan défini. Les drames de l’abandon ou du remords vivace s’effacent avec trop d’aisance si l’on ne les ravivent pas par fréquence. Il faut être fidèle à son drame. Sinon ce serait se disperser, devenir plume au vent, ne plus rien signifier.
Un soir de féerie triste où tout rire ou pleur sonnerait comme à côté. Bien déplacé. Hors de la question muette où le sommeil bientôt sombrera. Avec vous. Dans très peu de temps. Avec ce retour de la ville face aux vitres. Puis il faudra y traîner sa silhouette. Jouer les passants.
Reprendre sa place dans la ronde.
 Être aussi opaque, solide, que tous ces êtres aperçus par votre regard. Ceux qui filèrent en vitesse et sans retour s’en aller digérer plus loin leurs souhaits sans issue. En d’autres petites villes. D’autres places. D’autres endroits aussi passants aussi glaciaux que ceux d’ici.
Dans peu de temps vous qui n’avez plus rien à faire dans l’autre ville, vous vous retrouverez dans cet air froid de la gare éclairée. Vous aimez cette impression d’irresponsabilité douce de ces lieux de passage où vous vous rendez. Les paroles que l’on peut y dire ou échanger revêtent à vos oreilles une gravité singulière. Ce sont des paroles émises moins pour transmettre ou signifier que pour échauffer l’air... à l’image des vapeurs qui s’exhalent du corps des chevaux durant l’effort dans l’air frais d’une campagne.
En ces lieux interlopes il vous est possible de laisser se diluer votre malaise. La nuit commence à laisser jaillir ses vagues noires vers les trottoirs et le tuffeau des façades. Les grands murs blancs deviennent plus lumineux. Mais vous voyez cette nuit d’un lieu où vous resterez longuement inactif, puisque vous n’y avez plus ni relation ni passion en cours.. en conséquence de votre retrait ce lieu acquiert pour vous une forme puissante de majesté. Assez similaire à celle des déserts. Puisque tous les liens qui vous y rattachaient se sont évanouis. Exactement comme dans un désert immense, aride... un endroit où vous n’avez plus d’attaches donne toujours le vertige.
Vous voici neutralisé. Les gens à côtoyer un peu tous les jours vous parleront bien... mais cela ils le feront comme au travers d’une brume... comme au travers d’un lointain du temps ou des âges.
Aller à la boulangerie, boire un verre, discuter, vous promener, vous le ferez encore, mais cela, vous n’y participerez pas vraiment... loin de tout. La vraie solitude. Au milieu des autres. Ne plus piger leur agitation. Les voir encore tenir à des titres, des rôles, s’accoutumer du sort commun, avec la joie au cœur. À peine s’ils ne chantent pas leur liesse. Ils ne saisissent pas la mélancolie... ils ne s’élèvent pas... leurs pensées demeurent bestiales... sûrs de leur fait... dans les bureaux sur les routes ou aux échoppes... une foule fière de tout piétiner sans arrêt sans scrupule.
 
Il faudra reprendre aussi le cours des discussions interrompues. Refaire par ci par là le mariole.
Ivre ou non...
Recroiser des personnes... Ils n’auront pas peur de paraître bien ternes. Bien condamnés à ne plus pouvoir tenir toute forme que ce soit de rapport logique.
Enfin cette conclusion. Leurs mots, fussent-ils les plus banals, vous arriveront, décochés comme par maladresse... mais cela ne vous importera plus alors... ils s’adresseront à vous un moment seulement. Cela ne durera pas.
Vous aurez gagné le droit d’être au-delà... de ne plus vous occuper de l’histoire.
Voir de survoler de la pensée toute la scène... puisque cela vous est bien permis.
Ils ne signifieront rien qu’une présence, et la légèreté de tout le souci qui le fait émettre...
Au moins êtes-vous affranchi par l’effet de votre torpeur... Non, vous n’êtes plus un client potentiel de ces simagrées... (du moins le croyez vous... mais qui ne se croit pas invincible à ses heures de rêverie ?... vous voyez continuer de s’activer la foule, mais ne vous comptez plus au nombre de ceux qui convoitent les places... en fait, au mieux vous rêvez de sommeil. D’un long, d’un bon sommeil, affranchi de toute complication.
Le rêve d’un long sommeil tranquille. Paisible. Libéré de ces torpeurs.
Un vaste paysage en forme de sommeil. Une suprême étendue entrant d’elle même en résonance avec le ciel de votre esprit exténué et couvert de nuages. C’est assez confus à votre esprit, toute cette vision que vous vous faites. Mais cela tient. Et aussi c’est très flou, tout cela.
Et en même temps c’est assez précis pour que vous vous y retrouviez.
Mais comme vous vous retrouvez, au moins pour une bonne période... vous voici comme cloué à votre douleur actuelle mieux qu’une chouette à une porte du village. Vous voudriez qu’au moins tout ce cadre autour de vous s’accorde à de plus vastes aspirations. Que tout ce décor ainsi autour de vous ne pue plus ce même renfermé de vieux songe rebattu jusqu’en sa conclusion.
Que tout se mette en musique.
 Il faudrait voyager... repartir vers d’autres zones. Mais le sommeil dont vous rêvez vous sera, vous le savez bien, le plus beau des voyages, sans comparaison, si au moins vous en déteniez la clef vous permettant d’en ouvrir toutes les galeries closes à la curiosité du jour...)
Mais revenons, en épousant cette vitesse de la pensée... celle des pieds des dieux de jadis foulant les nuées. Nous allons vers le cœur en champ de mort. Ce cœur d’absence desséchée qu’est devenu ce coquet et si cosy salon bourgeois sans que ses protagonistes s’en soient un seul moment rendu compte...
Fernand fut donc heureux de l’avoir convaincue au moins en apparence, sa Louise si vénérée.
Mais il devait tout de même bien en rabattre. Nous l’avons vu. Atténuer un peu son expression figée de confiance joviale lorsqu’il causait à tout le monde dans la famille de sa si chère Louise.
Son idylle, il avait peur d’en sentir la lie humecter déjà son gosier.
Il ne lui restait plus assez de vin dans son verre, afin de pouvoir mépriser comme il l’aurait voulu cette absence de perspective face à laquelle il se retrouvait enfin, suite à toute cette confiance...
Lorsque tout vacille autour de vous, lorsque vos rares repères ne sont même plus là pour vous réconforter, vous n’avez plus qu’à tenter de tirer de votre propre viande votre propre ivresse.
Vous en êtes réduit à votre seul personnage. Plus de confiance possible et si facile.
La bonne piquette des serments ordinaires... on s’en sera pas mal resservi... de celles qui en se retirant vous laisseront une trop douloureuse gueule de bois, cette piquette ne vous convient plus.
Vous voudriez -et c’est à présent ce que Fernand ressent lui même, voir autre chose s’afficher à la face de l’autre que cette sempiternelle affiche n’annonçant pas de nouveau spectacle...
Tout ce monde disparu de l’enfance, empreint de douce sécurité, n’est plus au rendez-vous depuis un moment... à la place, c’est la nuit. L’espace s’ouvre face à vous. Plus vaste à mesure que vous avancez.

Vous vous retrouvez, bien forcé, obligé de faire bonne figure, avec vos os, votre carcasse bientôt rongée des vers... à devoir simuler la vie face à des convives qui vous sont parfaitement morts déjà, puisque vous ne faites plus partie de leur monde depuis un moment... autant causer à des tombes.
S’en aller les fleurir.
Aussi se palpait-il parfois le haut du crâne, ce Fernand, comme effrayé de ne plus y sentir la présence de cette couronne qu’il se rêvait constamment fixée sur son crâne... couronne de pavot alimentant tous ses rêves de sécurité sans fin... Il finissait par lire une certaine exaspération manifestée à son endroit dans le regard des autres convives. Il finirait par croire que toutes les phrases qu’il peut émettre sont sans conséquence, capables d’allumer les rancune dans tous les regards, à un point tel qu’il pourrait dire n’importe quoi, dire des obscénités, ou sortir sa queue, cela ne prêterait guère plus à conséquence, tant il a l’air déjà exclu... (il n’est à aucun moment, il le sait, entré dans ce décor, non plus qu’au Louvre on ne peut côtoyer les personnages des toiles, ces empaillés couverts de gouaches, si rigides dans leurs poses académiques, vêtus d’hermine ou de robes de brocart...)

 Lui qui se croyait la veille encore assuré d’un bonheur parfait, en roi couronné et vainqueur possédant sa chère et tendre à son bras, il devait suite à une crise de nerfs de sa fiancée en rogner de ses prétentions, et se trouver bien content de ne seulement plus trop l’offusquer par sa seule présence. Le charme était passé, semblait-il... il ne savait plus à quoi se raccrocher pour ne pas sentir lui même le sang d’une franche haine emplir ses veines, colorer ses joues pâles...
Il essayait bien de se faire le plus discret qu’il pouvait. De se plaquer derrière la plante. D’approuver tout le monde sur tous les sujets.
Tout cela pour au moins être un moment heureux de ne pas figurer un partenaire trop puant dans le joli tableau... Heureux mille fois qu’on ne lui jette pas des regards trop assassins au moindre de ses manquements au bon goût.
Alors, il faisait effort comme il pouvait, masquait son immondice en souriant davantage, se repeignait, parlait le moins possible, esquivait du mieux qu’il pouvait tout sujet trop gênant.
Ah, il était bien loin d’être autorisé à semer sa graine dans le giron de Louise... avant cela plusieurs années d’étapes éliminatoires l’attendaient. Des marches d’un marbre rose intraitable. Cela même si, comme des escales promises à ses lèvres gercées dans le désert, lui serait permis de tremper en son âcre abricot, parfois, entre deux averses d’avanies, sa bouche d’affamé manquant sincèrement d’affections.
Mais nous en sommes encore à présent à l’épreuve immanquable de la bonne conduite lors de l’interminable repas des familles.
Aucun impair ne doit aujourd’hui être commis par le jeune homme sur la sellette.
De toutes les familles du monde, et non pas simplement celle-ci...
Chaque famille importante se doit de contrôler ses entrées, et d’empêcher que n’importe qui y puisse prétendre entrer.
Du coup il choisissait bien tous ses mots, le Fernand, se composait des expressions qu’il espérait des plus supportables pour l’œil revêche de sa mégère adorable.
Les parents avaient l’air de l’apprécier d’habitude, mais il paraissait à Fernand qu’ils l’appréciaient, de fait, non pas comme un gendre potentiel, mais plutôt comme un nouveau venu dans le tableau quotidien, nouveau venu auquel on devait une certaine reconnaissance, puisqu’il apportait un peu de jeunesse et d’inédit à la distribution des connaissances habituelles foulant le grand tapis du séjour.
On l’écoutait, on lui souriait, on l’enjôlait de fines remarques suintant les faveurs... mais cela non à la façon dont on s’adresserait à un parent, fut-il lointain, mais plutôt avec ce ton frisant le maussade, l’impersonnel des politesses adressées à un portier ou à un domestique avec lequel on ne souhaite pas se montrer par trop hautain.
Quels que furent ses efforts pour allumer un peu plus d’intérêt dans les esprits de cette famille, Fernand devait se rendre à l’évidence de la réalité d’une distance demeurant malgré tout irréductible.
Un certain froid restait entre eux, impossible à réduire. De la glace et du vent.
Parfois, souhaitant se rendre le plus aimable possible, il en venait à trahir par des confidences soudaines cette ombre que l’on porte en soi, ombre précieuse, trésor unique qui en aucun cas ne doit se trouver trop éclairée par l’indiscrétion des compagnies.
Une ombre sans laquelle on ne saurait prétendre à son propre mystère.
Il commençait à déconner, à livrer des débuts de secrets, et tout cela gratis... et toutes ses paroles enchevêtrées, il les livrait à des personnes au mieux envieuses et revêches, au pire assassines et sournoises.
Cela révélait bien sa totale inexpérience du monde. Si l’on s’y expose trop, la gueule enfarinée éclairée sous le grand lustre, on se livre à tous les élans de moquerie les plus roués, à toutes les intentions les plus salaces. Mais il lui fallait encore faire le beau, sans savoir au juste pourquoi.
Or les rires chaleureux du paternel de Louise, à la fois ironiques et chaleureux, eurent tôt fait de faire taire en lui ces accès de confidence. Cependant le malaise perdurait, l’empêchant d’être pleinement tout à la situation.
Il avait toujours un temps de retard entre ses intentions, ses paroles, et le malaise déjà naissant...
Cela, et le fait que Louise, surtout prise de boisson, abandonnait paradoxalement tout naturel, pour se montrer guindée à un point si hargneux que son visage en devenait plus repoussant sous ses mèches que la face d’une méduse passant du poli du marbre à cette gélatine pâle de cet être invertébré portant le même nom.
Alors il remettait malgré lui en doute la portée réelle de son triomphe. Ce mirage de passion simulé l’heure d’avant lui apparaissait alors comme ce qu’il était effectivement, c’est à dire une mièvre comédie, un relent de prurit laid, ou bien le grognement informe d’un animal ayant fait ses besoins sur le paillasson.

(et pourtant on ne sacra pourtant pas avec plus de triomphe les rois ou les empereurs de l’Histoire, Louise en était bien certaine, dans la haute idée qu’elle se faisait des maigres faveurs ça et là accordées par son instinct si avare de ses cuisses comme de caresses sincères...).
Elle le trouvait bien mufle aussi de n’avoir pas toujours la grimace d’une joie reconnaissante au visage :
...Mais qu’il soit donc plus fier que de sa propre vie, d’avoir accès, comme cela, au moins les soirs où elle ne se donne pas des airs trop rétifs, à la chair de son corps si superbe. Elle au moins est aux anges ! Il ne le voit donc pas, ce malotru vilain...
Et lui doit l’être de même, ravi en extase, et bien plus encore.
Après toutes les bières qu’il s’est enfilé, il doit se montrer bien plus convaincu et convainquant.
On dirait que sa verve est éteinte, et non pas stimulée par la boisson.
Non, mais, a-t-on vu pire ingratitude ?
Elle en parlerait même à sa tante, si elle ne se retenait pas...
Là, tout de suite, c’est bien simple, dans la cuisine...
Pour qu’elle se rende compte aussi de cette injustice dont il se rendait coupable envers elle tous les jours... les hommes sont infects, immondes enfin, et nous sommes si bonnes de trouver plaisir à ce qu’ils nous chevauchent pour faire fondre nos résistances... la tante, bonne fille, aurait acquiescé à tous ses afflux de haine... (et sa pensée, en s ’échauffant, de pointer du doigt vers l’entrecuisse du jeune homme. Sa main sur la braguette qu’elle aurait voulu défaire pour en sortir le cierge. Afin de l’allumer pour le consacrer à son rite favori... et ce durant toute la nuit sainte).
Mais il lui fallait en toutes occasions découvrir de nouveaux impaires dans la conduite du jeune homme.
Sa raison féminine lui fait ainsi par son intuition découvrir sans arrêt de nouvelles esquives... de neufs détours où trouver moyen de ménager à son amour propre une place où pouvoir à nouveau s’épanouir... une fois que cette ombre masculine aurait disparu du tableau... lui masquant encore tout le soleil qu’elle se rêve... un astre d’égoïsme afin de se sentir seule et bien parfaite dans ses jolis vêtements...
 (on voit à quel point ces genres de chamailleries n’ont pas de borne dans les fraîches cervelles parfumées).
Elle contemple ces photos de leur union si récente. Mais ça n’est pas encore cela... Il lui faudrait de plus jolis costumes encore. Ces velléités d’élégance ne suffisent pas. Il lui faut un gentleman complet et qui en ai l’air, vraiment.
Surtout elle souhaiterait plus de faste dans sa mise et ses manières.
Les petites revues des étalages lui procurant le reflet des gloires consacrées du moment ne concordent pas avec la vision à laquelle elle souhaiterait pouvoir un jour correspondre dans le couple épanouissant qu’elle se rêve. Car son couple doit en tous points correspondre aussi à tout ce décorum factice. Ces apparences de gloire superficielle sans lesquelles elle ne peut croire avoir atteint l’Himalaya du bonheur domestique.
 Décidément elle ne sait pas si elle ne va pas le planter là, ce Fernand, avec sa confiance, ses chemises repassées et toutes ses belles phrases... et chercher plutôt quelqu’un qui corresponde mieux à tout son beau rêve épanoui d’idylles peaufinées en tourbillons de senteurs.
Mais lui le Fernand, il commence à ressentir un désir plein, sauvage, lui parvenir par vagues.
 Pour sûr qu’il ne résisterait pas... et dès à présent. Il ne se contiendrait plus... ne pourrait réduire ses ardeurs (ainsi qu’une voilure gonflée par un vent violent)... tant son désir darde ses vœux vers son cher trésor inespéré. Lui si délicat. Si timide, si taiseux et si prévenant en présence de sa belle-mère. Le voilà suant sous le coup d’une émotion trop forte pour lui. Il est pris de porto.
Puis les litres de bière bus auparavant ne sont pas étrangers non plus à toute son émotion. Il le sent bien.
Tout triomphant. Tout épanoui et sûr de lui dans le grand salon. On ne fait pas plus déplacé. Ni plus surprenant d’orgueil et de présomption... il s’égare. Il est jouet de son énergie. Malgré la surveillance de celle-ci, de sa belle-mère (pourtant redoutable de son œil de milan qui le scrute). Prêt donc à l’instant à se débraguetter. Pour pointer vers l’aimée. Comme ça. Sans délai. Sans prévenir... Son membre superbe et joliment rincé. Ainsi qu’un hommage érigé pour saluer tant de magnificence.
Cela s’explique. Sa queue dressée serrait pour lui comme le symbole de tout son désir, sans commentaires, le résumé de l’énergie qu’il souhaite consacrer à pourfendre de son hommage l’objet de ses vœux... mémé, d’un œil rieur, commence à désapprouver de la voix... c’est qu’il s’apprête vraiment à le sortir, son engin.
La chanson de l’écran est bien assez entraînante. Il s’y laisse prendre.
Ne tient pas son alcool. Il reste imprévisible. Tangue vers le guéridon. Il veut le montrer son oiseau chanteur... le sortir du nid... pour le faire s’envoler vers un autre, plus odorant nid gorgé de parfums.
Pour lui dédier enfin toute sa sève et son corps exprimé par une chaude averse de semence sur ses seins blêmes...
(commence ainsi le chant de Fernand, prononcé par son sang très riche de murmures)

A sa poitrine fluette tout le lait chaud des ferveurs. (il chantonne, intérieurement :

Iou Iou, grâces et beautés, enfin résumés dans cette personne
bergères et lavandières m’ont fort lassé,
elles ont irrité en moi sans fin le désir.
Il fallait que ce calvaire cesse
une femme du monde, et pour moi seul, nom de foutre !
ses yeux noirs et sa malice de chatte
Iou Iou je re-nais enfin ! Plus de râle dans les solitudes !
de la geôle de ma chambre à croupir jusqu’aux os
ou du hamac où
balancer mon pauvre corps supplicié
ma carcasse criblée de manques
et privée de tout réconfort
réclamer des faveurs céleste, enfin bien méritées
d’une compagne enchantant nos misères
au loin hurlent émeutes ou bordées
près des baraques grises tellement
ils sont tous à s’étriper pour clore les fêtes
Iou Iou ! nous renaissons ! nous sommes plusieurs
dans mon corps mes entrailles
une foule entière : celle de mes années de solitude se mettant en marche.
un nouveau feu se ranime...
j’écoute le son de sa voix
et ne suis plus ce soldat à l’agonie
que foulèrent toutes les déroutes de toutes les armées
vaincues de l’Histoire... et mes couilles ne sont lourdes que pour elle !

 

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