Parmi les livres que j’ai lus enfant outre ceux que j’ai cités déjà sont ceux que je dirais n’avoir pas avoués. Dans le cosy-corner où je dormais enfant était la maigre bibliothèque de mes deux parents lecteurs inassidus et qui se composait d’une dizaine d’œuvres. Mes préférés étaient au nombre de deux livres avec illustrations et d’un troisième sans mais qui en suggérait des vertes et des bien mûres. Les deux premiers étaient Aphrodite et les chansons de Bilitis de Pierre Louÿs. Le troisième un volume d’Havelock Ellis. Je les lisais au lit une main bien au chaud et goûtant tous les mots lesquels prenaient des poses et émettaient des sons pleins d’odeurs licencieuses. Bien sûr je regardais autour et j’écoutais si mes parents étaient inoccupés de moi. La fièvre me rendait la chose délicieuse et lire ces ouvrages m’était surement comme un auteur l’appelle ce vice impuni. Parfois en écrivant je bute sur les mots comme je trébuchais sur ceux que je lisais dans un brouillard tremblant. Pierre Louÿs m’est demeuré comme un dépuceleur mais je n’ai plus rouvert le volume édifiant de Havelock Ellis. Depuis pour moi écrire est me ressouvenir en partie de ces livres et de ce lupanar antique où j’ai pris pied avec lequel j’écris avec lequel j’ai lu ce qu’à présent j’avoue de mes lectures prohibées d’enfant vicieux et de vieux lecteur impuni et vicieux comme il était enfant.

On écrit aussi avec son pied.

Fredrik Nietzche (dit : avec les pieds)