Présence des temps ingénieux
Qui agrègent les agressions
Les fondent comme or précieux
En entassent d’autres pour que lauriers et eau pure
De connivence continuent le chemin entrepris
Dans la parole des hommes livrés au dieu
Ce fut longtemps le geste adroit
Qui assura richesse et honneur à la cité pythique
Piteuse cité que cette Delphes
Sise dans le désordre des jours présents
Présence spectrale et muséale
Qu’aucune Muse n’anime désormais
Hormis toi et quelques poèmes aimés
N’était toi qui glisses au-devant des vents houleux
Dans le secret des montagnes parnassiennes
Sur tes skis de Norvège
Je dirais le lieu vide de chants
Quelque chose de toi à moi,
De moi au monde qui va dans tes yeux
Et passe dans tes jambes
Nous relie tous et toutes au grand Nord
S’imprime là dans tes yeux délébiles
Qui fixèrent l’image
De ta présence vouée à l’éphémère des rives
Dans le sein les montagnes grecques
De mortelle provenance
Le nombril du monde,
A l’aube,
A des reflets d’opaline
Si légère de sens en ses reflets
Pareille aux paroles ambiguës de la Pythie
L’ambiguïté même ordonnée à la splendeur d’Apollon
Qui acheva sa course millénaire dans les oreilles de Théodose atterré
Opale mutique
Dés-avant perçue
Traversée des couleurs venues des tréfonds de la terre
Vouée aux tourments des naissances stellaires
Nombril du monde que le vol de deux aigles
Ne saurait circonscrire
Inscrit dans les pierres changeantes
Inconnues de la Grèce d’antique mémoire
Et qui, du dieu chrétien ou du site lui-même livré aux caprices de la terre tremblante,
Acheva de réduire les lieux à cette poussière touristique ?
Qu’on y prie, qu’on y danse, qu’on y écume,
Ce n’est que ruines éparses et colonnes brisées,
Dans le désormais d’une mémoire
Vouée à la splendeur intacte des lieux
Le vent, le vent mêlé à l’ailleurs des lieux
Ici et maintenant
Qui toujours assènent aux forces absentes
Encore présentes dans des concrétions antérieures au désastre évoqué
Voilà qu’il consent à porter
La parole ruinée qu’il faut reprendre
Paroles dont le fil rouge court dans le tourment des hommes et des femmes de ce pays
Ici et de maintenant
Dans l’actualité brûlante des heures
Le sursaut démocratique
Qui les anime
Jean-Michel Guyot
12 avril 2015