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 Article publié le 19 juillet 2015.

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La moustache panoramique de Salvador Dali surplombe une bouche souvent hermétique, tandis que son regard, braqué ou extralucide défie la caméra ou son interlocuteur.

 Dès que la parole s’extrait de sa gorge, c’est un flux, c’est un débit fortement inspiré qui se répand, mêlant savoureusement la vie et l’art, jusqu’à les confondre. A partir du pinceau, un espace-temps puissamment fantasmatique, un espace-temps nouveau, et au-delà, le talent de nommer, le talent de mettre des mots sur son propre tableau, sur ses propres œuvres. La peinture, l’art, la philosophie s’agrègent avec enthousiasme, donnant naissance à un dépassement esthétique, à un dépassement transcendantal.

 Rien ne dépasse, là, à partir de cette table ou ce pupitre, tout est en ordre, en bon ordre, tout est en mouvement, sur la question du narrateur, un narrateur toujours en question. Sur la question de la littérature. La voix est posée, précise, elle emplit l’auditorium, un auditorium attentif et enthousiaste, à l’image du vecteur ou média vivant en train de développer.

 A l’image de ce professeur de lui-même.

 A l’image d’Alain Robbe-Grillet.

 Les fantasmes, oui, la narration ouverte, oui, l’esthétique, aussi, le jeu, sempiternel, avec la langue française … et le livre, aussitôt terminé et refermé, est aussi léger qu’un souvenir. D’un continent à l’autre, la bonne parole de la modernité se répand volontiers. Tout cela à partir des ruines, socle indispensable semble-t-il à toute forme nouvelle, à toute innovation. L’ontologie ne serait-elle pas dominante chez le Pape du Nouveau roman ?

 Tout comme les plans du cinéaste américain, criblés de masques, visibles ou invisibles, des plans qui font se succéder de superbes créatures de rêve traversées par des problématiques irrésolues et un médecin apparemment sans ennui, sans souci, dont la vie est réglée comme du papier à musique. Mais le quadrumane n’en a cure : instinctivement, il projette un ossement qui monte en circonvolutions, le vaisseau, lui, opérant le mouvement inverse.

 Y a-t-il véritablement un dialogue possible, Johnny ?

 Alex ?

 Qu’en pense le petit d’homme dans le grand hôtel ? Seul, dans sa voiture, seul, dans les couloirs ? Hal … pourquoi ressemblez-vous autant à nous ? Pourquoi votre voix est-elle aussi touchante ? Ambiguë ? Qu’elle soit en version originale ou dans une autre langue ?

 Nul ne le sait sinon monsieur Kubrick lui-même, ce jeune homme dont les premières photographies mettent en lumière la puissance du clair-obscur, dans une statique incandescente.

 L’immobilité, là, s’habille de couleurs primaires, de lignes strictes, d’angles droits successifs qui dépassent le cadre lui-même, qui dépassent le tableau.

 Qui dépassent la toile.

 La couleur sirupeuse des paysages de Hollande cède la place, peu à peu, à la couleur compacte de l’architecture urbaine. Les tons diminuent, les lignes jaillissent, une nouvelle dynamique est en train de naître. L’Amérique et ses plans en damier accueillent un atelier bien singulier, celui du promoteur de l’art abstrait dont les différentes surface domestiques, maintenant, sont le reflet de son œuvre novatrice. Dehors, la cartographie est identique, légèrement en retard par rapport aux formes du peintre. De Piet Mondrian.

 Ses écrits sur la nouvelle plastique et l’abstraction sont aussi discrets et ordonnés que ses tableaux. Une cohérence monumentale qui pense que l’avenir est à la simplicité des formes. Et des rapports humains.

 Ces derniers sont souvent découpés à travers la caméra, là, dans un noir et blanc qui met en valeur les jupes et les pantalons, tandis que les visages, invisibles, émettent des sons, émettent des phrases, émettent un logos où le masculin et le féminin tentent de se rejoindre. Les considérations, plus spontanées et singulières les unes que les autres s’enchaînent comme les plans, les voix d’hommes et de femmes s’entremêlant sans se toucher …

 Le paysage urbain est rapidement saisi, le silence ou plutôt les bruits de fond de la ville soutenant la narration. Une narration ouverte. Toujours. Comme le regard faussement hermétique de la jeune femme dirigé vers son fiancé – du jour ? d’un jour ? d’éternité ? … - en train de se raser, là, dans un appartement parisien, un regard commandé ou provoqué par le metteur en scène, par Jean-Luc Godart. Les caractères se jouent des conventions, se jouent de la civilisation.

 « On pourrait le faire dix fois par jour, vingt fois par jour … » .

 Qu’en dit le téléspectateur ?

 

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