Le village semble endormi et drapé dans un brouillard plus gris qu’un mouton électrocuté par la foudre. « Les arbres n’ont plus d’appétit » dit un vieux qui regarde un grand corps de bois mort tordu et grimaçant. « Même eux sont malades » continue le vieux sur un ton inaudible. Il parle avec le mode silencieux des morts. De près on s’aperçoit qu’il est jeune et ridé. Devant le cimetière il dit en crachotant : « Eux sont en paix là-bas et loin de leurs écrans et du mal de l’image de l’autre coté ». On entend au lointain les rafales du vent le doigt sur la gâchette. C’est sorti des écrans comme un cirque ambulant avec ses saltimbanques à la bouche pourrie. Ce sont les lingots d’or d’une bouche édentée le fronton d’une banque. « Les filles sont cachées dans les granges de l’aube » dit le petit vieux d’un cardant égrillard.

Il y avait aussi les enfants sur les ponts, qui montent et qui descendent.

Cesare Pavese