Ces deux mots sont presque des gros mots, en France.
Dilatés, ils le sont, oui, pour affirmer, au sortir de la guerre, une possibilité nouvelle de voir le monde. D’être au monde. Une possibilité nouvelle d’inventer l’homme.
De rénover sa conscience.
Un adjectif qui précède un substantif, l’association devenant une incontournable identification, celle d’écrivains aussi éclectiques que talentueux, de personnalités fortes, de personnalités
mixtes.
Nathalie Sarraute.
Claude Simon.
Alain Robbe-Grillet.
Samuel Beckett.
Michel Butor.
Claude Ollier.
Et d’autres, accolés ou apparentés …
Au sein des ruines de l’après-guerre, dans ces années cinquante, s’élèvent ces voix, s’élèvent ces plumes, démontrant, une fois de plus, que la littérature poursuit sa mue.
C’est l’Amérique et son réseau universitaire qui accueillent volontiers cette innovation française, tandis que le pays de Clovis s’arqueboute sur des positions académiques pour ne pas dire archaÏques, par le biais de la presse ou de la critique.
Les nouveautés ? Structure narrative plutôt qu’histoire, goût de l’expérimentation, bannissement ou rénovation du concept de psychologie, sens esthétique.
Modernité, en un mot.
Leur prose est sérieuse, certes. Leur but n’est pas d’ouvrir les zygomatiques du lecteur, encore que ... la pièce " En attendant Godot ", de Samuel Beckett, développe une noirceur si grande que le sens, parfois, s’achève obligatoirement par un éclat de rire délirant, comme si cette attitude était la seule à adopter face à l’absurdité réelle du monde.
Le sérieux de leur prose tranche parfois avec leur jovialité, notamment celle de Samuel Beckett ou d’Alain Robbe-Grillet. Celui-ci a l’habitude de parler de littérature, avec enthousiasme et pédagogie, il aime également les joutes, s’amusant des attitudes parfois changeantes de ses contradicteurs qui préfèrent, avec le temps, adopter le Nouveau roman, ne serait-ce que par snobisme, rejoignant malgré eux les personnages de Marcel Proust.
Alain Robbe-Grillet ...
Littérature et philosophie se confondent, avec lui, avant d’être diffusées sur tous les continents. Son propos est en mouvement, toujours, en digression, souvent.
Le réceptacle des contempteurs lutte incessamment.
... et le Pape se divertit, tout en diffusant la bonne parole néo-romanesque.
En 1969, les lauriers suédois consacrent l’un d’entre eux, le dramaturge irlandais au visage buriné, taillé à la serpe, au visage qui englobe deux yeux d’aigle.
Le Pape sourit, tout en poursuivant son oeuvre qui atteint une certaine maturité.
" Projet pour une révolution à New-York " .
" Souvenirs du Triangle d’Or " .
Le paradoxe suprême s’exprime à travers l’intégration du Nouveau roman dans les programmes de l’Education nationale dont le corps, dont la matière professorale demeure pour le moins réfractaire.
Le temps avance et avec lui l’épaisseur des nouveaux romanciers …
En 1985, les lauriers suédois, à nouveau, consacrent l’un des leurs, Claude Simon. Les éditions de Minuit, décidément, attirent toujours la lumière …
Les pièces de la discrète, dame Nathalie, sont jouées.
Pour un oui ou pour un non, la critique continue, aussi virulente que les forces menant au régicide, mais la texture mobile du Nouveau roman poursuit son aventure.
En attendant la reprise …