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Seriatim 2
Seriatim 2 - Tout le monde n’a pas un grand-père (Patrick Cintas)
![]() oOo « Tout le monde n’a pas un grand-père Pour choisir le pays de son enfance Ah merde de pays où je suis venu mou Venu mourir avec sa langue morte ! »
Même le meilleur des poètes a rêvé de coloniser Les zones où perfection et pureté nourrissent Le rire de l’homme en proie à ses évidences / Bamboulas d’une forêt à l’autre sans alizées / La pensée connaît l’inconnaissable sans Dieu / Et l’esprit joue avec le feu donné par les orages / descendu de sa montagne de Juif, d’Arabe Et de Phénicien (ou n’importe lequel
Il veut des enfants heureux et il trouve la femme Qui les lui donne / comme il les donne à cette terre Où l’épée est la seule croix / misère de l’intelligence Ici-bas : toute la Méditerranée rassemblant ses passagers / et Paris proposant ses autoclètes au tourisme éditorial / des nuées de tacherons lécheurs de vitrines le soir Après le turbin des jours / lui avec son mouton sur ses Épaules de volontaire / transportant l’anarchie dans ses Poches / bavard le Français n’apprécie pas la prosodie Visuelle / sur le zinc ou devant la télé / dans son jardin S’il a la chance d’en posséder un / aligne des vers comme Des bouteilles à la consigne / « l’idée c’est… » au ministre Venu pour inaugurer / « nous avons la même idée de… » « je te fais poète poète tu me fais poète poète » / mais Quel mouton n’a pas vécu son enfance en agneau ?
Marmaille dans les jardins / culs posés sur les bancs Avec son mouton et sa laine en péril : il passe pour Un pédophile ou un amateur de femmes au foyer. « puisqu’on ne tient pas le même langage vous et moi ! » Jadis il se laissait aveugler par les façades bleues / Revenant des hauteurs où la neige persistait sous Les oliviers : il prenait le temps de cligner des yeux / Il se voyait dans le lit / plafond ouvert au ciel / Les chevrons de châtaignier en torsades savantes / « d’où viens-tu si tu existes, hijo ? » / mais l’oubli Sert de fourreau au patriotisme / « non, pas de barque Ni de voile dans les embruns du soir : mes pieds Et le poids de mes possessions / mes poches Et mes épaules / ne suivant rien ni personne / Je sais ce que je dis » / toujours le saura / mais Pour le dire ah/ ça c’est une autre question ! « les mots à la place de mes coteaux ? » / lièvres Fous entre les lentisques / enfant tu courais après Eux avec les chiens : maintenant tu colles ton front Sur la vitre / cristaux / buée / personnages vus En plongée / caméra ne tourne plus : mémorise : L’image change de nature / comme j’ai troqué Ma terre contre une poignée de sel / privados Erán / y tú : servidor / criado, mozo : ni dueño Ni señor / « vetea ganarte la vida, hijo » / marin Non : caminante : promeneur non : voyageur : non / déplacé / quel vent persien ? quel âge persien ? Quelle chronique du Bien et des Aléas ? quelle Histoire ? / lèvres grasses de l’autochtone adapté Depuis longtemps / l’outil sur l’épaule considère Ton mouton d’un mauvais œil : je suis romancier / « moi non plus ! » / ne touche pas l’épaule / ne Fouille pas la poche / prend la photo / « tourne-toi » Des chaouchs de bas en haut : selon salaire : gilets De domestiques selon couleur : « d’où viens-tu ? » Tu sais que tu n’as pas d’âge / alors venir de Quelque part / « comment que tu t’appelles Si c’est pas trop te demander ! » / là-bas (nommons Désormais les choses par leur nom) la pluie rend Aux murs leur bleu ancestral / la pluie a trouvé Le moyen de rendre le blanc aussi transparent Que l’eau / porte ouverte ou il n’y en a pas / Sur le seuil le balai est composé d’un manche D’oranger et d’une barba de moro / dingaling Du marchand / « on s’est connu là-bas : souvenez -vous » / des idées à la pelle comme leurs feuilles Ramassées en chanson plutôt qu’au fil de la poésie / peuple des surfaces cultivables / abandonne ses Forêts où nous les avons laissées : invincible armada. Invincible amada : veut-elle des enfants de moi ou Mon argent : contre le prix d’un mouton aux pattes Noires / ne comprennent rien à la Vue / ni à la Voix / « faut des idées sinon faut les inventer » / un vers Par page finalement : et des pages blanches en pagaïe / ça rame sur bâbord ou tribord avec bonne conscience Au taquet ou à la gueule / « qui est-elle ? » / mouton Avec Pathelin ou Panurge : flatteurs et béni-oui-oui
Là-bas / là-haut / Nous possédions un bien / nous nous aimions malgré tout / nous connaissions cette existence / mais le soleil / les coupes rases / / les Colonies / le sang mêlé / / les chaînes / les naufrages / / les comédies / les tragédies / / les farces / les entremeses/ / toi / moi / le feu gagné sur la pierre Et la pluie perdue en chemin / mouton Je te vends / j’ai la poche et mon épaule N’en peut plus / j’ai trouvé une femme Ici / plaisir, tendresse et l’avenir / mouton Du passé : comprends-moi / je suis verde
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