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Revue en ligne

jeudi 18 avril 2024

Revue d'art et de littérature, musique
Directeur: Patrick CINTAS

Signes ascendants
de l'écriture

écrivez pour...

Pascal LERAY
Ce qui définit le projet du Chasseur abstrait, c’est définitivement la traversée des plans de réalité.

Les frontières n’ont de sens que dans leur franchissement.

On ne sait pas bien quel idiot ou quel génie est à l’origine de la notion de frontière. Ce qui paraît sûr, c’est qu’il devait être un conquérant. Quelqu’un qui a jugé utile de dessiner les limites de son territoire. Et pour avoir jugé utile une telle opération, il devait bien avoir quelque chose en tête. 

Les limites n’ont de sens qu’à être dépassées.

Et les frontières, les limites, relèvent d’ordres multiples : les frontières nationales tout d’abord. Nous les transgressons joyeusement, chez Le chasseur abstrait. Ce n’est pas pour rien que l’une des premières publications de la RAL,M avait pour thème : l’étranger. La littérature n’a pas de pays ; elle les a tous. C’est pourquoi la RAL,M n’est pas systématiquement francophone. Elle se veut le relais d’expériences toujours singulières, elle s’en fait le rapporteur. La RAL,M plaide pour un monde multipolaire.
Mais les frontières nationales ne sont qu’un aspect du problème. Il en est d’autres, plus ou moins métaphoriques, certes. Qui s’y heurte sait pourquoi elles ne sont pas toujours virtuelles 

La RAL,M est transdisciplinaire. L’idée que des écrivains, des musiciens, des peintres, des sculpteurs, des photographes, des philosophes, puissent travailler ensemble, offrir un contenu (continu ?) commun n’est pas neuve, mais elle est inusable, si l’on s’offre la peine de choisir judicieusement ses axes de travail : c’est le sens de l’Atelier de lecture et de sa collection de CD audio que nous avons lancés : DIRE LE TEXTE. C’est aussi le sens du cahier de la RAL,M consacré à la série, en cours de préparation. La série traverse les domaines de la création : comment s’y prend-elle ? Quelle est la nature d’une communication qui s’opère d’oeuvre en oeuvre, par rebonds successifs, et traverse toute la société, ce faisant ?

La RAL,M ne se contentera pas de traverser des frontières géographiques ou conceptuelles. Ce qui définit le projet du Chasseur abstrait, c’est définitivement la traversée des plans de réalité ; nous serons sans scrupules : le Web offre un plan de réalité, l’espace éditorial en offre un autre, les rencontres directes avec le public permettent de dégager un troisième plan de réalité : le Chasseur abstrait investit ces espaces, non indifféremment, mais avec la même énergie, le même enthousiasme : donner à lire, à entendre, à voir et à penser. C’est là le sens de notre présence à des manifestations telles que le Salon du livre, où nous étions en mars dernier. Expérience des limites, pour reprendre le mot de Georges Bataille.

Et c’est là tout le sens d’une démarche éditoriale qui entend offrir à ses auteurs un espace éditorial d’exception, dégagé du formatage auquel trop d’institutions vivantes se sont pliées, pour lesquelles : un polar ne peut pas être un roman expérimental ; un écrivain n’est pas un musicien ; un poème doit avoir "du sens" ; un livre appartient à un genre littéraire. L’émergence de la frontière ne naît que dans le développement du territoire. Le point où convergent - avec tous les éclats qui peuvent s’ensuivre - les forces en présence, c’est la revue, la RAL,M.

 

Revue d’études sérielles :

pagesperso-orange.fr/etudes.serielles/

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... le portrait d’Aimé Césaire qu’André Breton trace comme l’écriture même dans ce décidément bon livre qu’est "Martinique, charmeuse de serpents". Il m’a toujours semblé, mais depuis le temps a passé et c’est maintenant une quasi-certitude, que ce portrait est plus généralement celui de l’écrivain idéal selon Breton. En huit points :

 - 1. Cet écrivain est "engagé tout entier dans l’aventure", il dispose "de tous les moyens capables de fonder, non seulement sur le plan esthétique, mais encore sur le plan moral et social, que dis-je ? de rendre nécessaire et inévitable son intervention."

 - 2. "C’est la cuve humaine portée à son point de plus grand bouillonnement, où les connaissances, ici encore de l’ordre le plus élevé, interfèrent avec les dons magiques."

 - 3. "J’ai été confirmé dans l’idée que rien ne sera fait tant qu’un certain nombre de tabous ne seront pas levés, tant qu’on ne sera pas parvenu à éliminer du sang humain les mortelles toxines qu’y entretiennent la croyance - d’ailleurs de plus en plus paresseuse - à un au-delà, l’esprit de corps absurdement attaché aux nations et aux races et l’abjection suprême qui s’appelle le pouvoir de l’argent."

 - 4. "Ce poème n’était rien de moins que le plus grand moment lyrique de son temps."

 - 5. "Un poème à sujet, sinon à thèse."

 - 6. "Le don du chant, la capacité de refus, le pouvoir de transmutation spéciale dont il vient de s’agir, il serait trop vain de vouloir les ramener à un certain nombre de secrets techniques. Tout ce qu’on peut valablement en penser est que tous admettent un plus grand commun diviseur qui est l’intensité exceptionnelle de l’émotion devant le spectacle de la vie (entraînant l’impulsion à agir sur elle pour la changer) et qui demeure jusqu’à nouvel ordre irréductible."

 - 7. "Derrière cela encore, à peu de générations de distance il y a l’esclavage et ici la plaie se rouvre, elle se rouvre de toute la grandeur de l’Afrique perdue, du souvenir ancestral des abominables traitements subis, de la conscience d’un déni de justice monstrueux et à jamais irréparable dont toute une collectivité a été victime."

 - 8. "Il est normal que la revendication le dispute dans le "Cahier" à l’amertume, parfois au désespoir et aussi que l’auteur s’expose aux plus dramatiques retours sur soi-même. Cette revendication, on ne saurait trop faire observer qu’elle est la plus fondée du monde, si bien qu’eu égard au droit seul le Blanc devrait avoir à coeur de la voir aboutir."

Extrait de "Cosmogonies" de Patrick CINTAS.

 

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LECTURES
DOCUMENTÉES


 

Approche des œuvres textuelles de l’artiste Fluxus Dick HIGGINS
Véronique PERRIOL

Dick Higgins a produit une œuvre à facettes multiples comme artiste, poète, compositeur, théoricien et imprimeur. Il est un membre fondateur du groupe Fluxus qui a été initié par George Maciunas en 1962. Dès 1957, Dick Higgins couche sur papier des poèmes aléatoires et des compositions verbales comme « 27 Episodes for the Aquarium Theater to the Recognition of Antonin Artaud ». Ces compositions présentent des situations variées avec des commentaires parfois sur les personnages, les décors. Pour Dick Higgins, il s’agit de proto-happenings ou de pièces à scénario, qui consistent pour certaines à « travailler avec des notes qui soient des mots ».[1] Grâce à la musique, les mots sont agencés afin de rompre avec la linéarité d’un énoncé. Ces œuvres sont tout à fait expérimentales, mais restent assez proches du théâtre, en étant des sortes de scénario au point que George Maciunas les qualifiait de théâtre néo-baroque. Néanmoins, dans cette œuvre de 1957, la référence à Artaud signale un des objectifs futurs de Dick Higgins qui est d’établir une continuité entre l’art et la vie. La recherche d’une œuvre ouverte sur le monde est le dilemme de l’expression artistique qui intègre la singularité d’un événement et l’intégrité du corps. Dick Higgins débute aussi en mai 1957 la série des « Lecture » [« Conférence »] qui présente un énoncé beaucoup plus épuré et synthétique, laissant une liberté d’action à l’interprète sans une profusion de détails sur la situation. Par exemple, « Lecture Number Two » [« Conférence Numéro Deux »] énonce : « Le conférencier lit : “Le jour commence. Après un certain temps, le jour se termine. Le jour commence. Après un certain temps, le jour se termine… ” Ceci est répété le nombre de fois qu’un jour commence dans un laps de temps, comme la semaine, une quinzaine de jours, un mois, une décade, un siècle, un millénaire, etc. » (automne 1959). Une telle œuvre prend sens dans sa mise en acte, par une confrontation directe avec la réalité, grâce au principe de répétition qui est censé la tester. Higgins propose ainsi un système, une procédure dont l’application est laissée au libre choix de l’interprète.


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Renaud Camus, un anticonformiste conservateur
Benoît PIVERT
Sans doute peut-on classer Renaud Camus parmi ceux qu’un hebdomadaire avaient nommés « les nouveaux réactionnaires ». Malgré l’union improbable des termes, il apparaît comme un « anticonformiste conservateur ».

Renaud Camus voyage. Celui qui depuis des décennies s’était, dans son journal, fait le peintre amoureux des beautés de la France profonde, entre églises oubliées et châteaux enchanteurs, entraîne aujourd’hui ses lecteurs sur de nouveaux sentiers. Le Journal romain 1985-1986 et son prolongement Vigiles – Journal 1987 avaient déjà été l’occasion d’arpenter Rome et l’Italie en compagnie du locataire temporaire de la Villa Médicis. Plus récemment, une invitation lancée par l’ambassade de France en Corée a inspiré à l’écrivain ce titre mystérieux Corée l’absente : journal 2004. Afin de ne pas gâcher au lecteur la découverte de ce dernier tome du journal, nous avons choisi de l’entretenir ici de l’année précédente, 2003, qui avait conduit Renaud Camus en compagnie de son ami, Pierre, vers les bruyères et les brumes de l’Ecosse, souvenirs consignés dans un volume intitulé Rannoch Moor[1], en mémoire de la lande de Rannoch serpentant parmi les lochs endormis.

 Ce qui aurait pu n’être que le récit d’une villégiature estivale devient ici rapidement un pèlerinage littéraire. S’engager sur les traces de Renaud Camus, c’est pour le voyageur avoir l’assurance d’un guide érudit qui commente savamment les lieux chargés d’histoire. Dans Rannoch Moor, l’écrivain entraîne le lecteur-voyageur tout d’abord à travers l’Angleterre, en choisissant soigneusement ses haltes en fonction de leur patrimoine littéraire. Entre le Kent et le Sussex, c’est tout d’abord Rye où Renaud Camus se met en quête de la demeure de Henry James. Après la traversée de l’Est du Sussex, l’écrivain fait une pause près de Burwash afin d’y visiter la maison de Kipling.


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La touche intermusicale de la peinture La nausée de Sartre
Vassiléna KOLAROVA
« La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent pleinement vécue, c’est la littérature. » Proust.

La textualité littéraire dans le roman « La Nausée » apparaît sous une forme inhabituelle, qui lance défi au lecteur attentif. Elle est cachée dans quelques nominations clés dont l’analyse lui permet de surmonter l’analyse littéraire stricte. De ce point de vue l’étude de l’art en général est très importante pour l’œuvre littéraire afin de rechercher une approche interartistique plus approfondie ( incluant le domaine des autres arts ), ce qui permettrait une connaissance de la textualité littéraire plus grande elle-même faisant partie du tissu artistique. Etant conçu en tant que partie intégrante du domaine, et dans ce sens du champ de recherche des autres arts, le texte littéraire atteint des grandeurs inhabituelles qui sont en dehors de ses dimensions traditionnelles sans cesser en même temps de chercher sa forme tout au long d’une poursuite philosophique extraordinaire.

La signification étymologique des noms et surtout celui du personnage principal est d’une importance suprême pour la compréhension du roman puisqu’en même temps ils s’avèrent une preuve incontestable qui soutient des vérités déjà découvertes, notamment « le livresque », la couche purement artistique de ce texte « en relief », / texte-image /. Le nom de Roquentin témoigne de la lecture abondante du personnage en le rendant livresque lui-même. Ce nom qui permet tellement d’interprétations suggestives, se stratifie tout en rangeant en plusieurs couches les auteurs qu’on peut lire à travers lui, ainsi que les œuvres[i] qui augmentent leur nombre, encore plus concentrés en lui. Lecarme[ii] rapporte toute une série d’œuvres de Maupassant que « La Nausée » reprend en hypertexte : les lieux normands que l’auteur emploie parmi lesquels Roqueville (la ville de Roquentin).C’est bien un indice sur l’esprit bourgeois qui pénètre l’atmosphère empoisonnée de « La Nausée ».


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Librairie du gay savoir
Serge MEITINGER
Espace d’auteurs : Librairie du gay savoir

André Gide : Corydon, Gallimard, 1924 (Folio, n° 2235).

Paru en 1911 de manière confidentielle, à douze exemplaires, ce petit livre qui ne comportait pas encore les quatre dialogues tenus entre le médecin Corydon et un narrateur qui se fait l’avocat du diable resta, nous dit l’auteur, dans un tiroir jusqu’à sa mise au jour effective en 1920. Depuis, ces pages ont fait carrière et le fait qu’on puisse désormais librement y accéder en une collection de poche souligne assez une évidente évolution des mœurs, des mentalités et des lois. Dans les années vingt du vingtième siècle, l’auteur qui évoquait un tel sujet, avec objectivité et sans détours apitoyés ou méprisants, sans allusions graveleuses, était encore obligé de se défendre d’une accusation d’atteinte à l’ordre public !

Le point de vue adopté peut toutefois nous paraître dépassé car Corydon, médecin des corps et des âmes, visant à défendre et à illustrer la tendance sexuelle qui est la sienne, se fait fort de caractériser ce qu’il appelle « une pédérastie normale ». Et, ce faisant, il exclut et, de fait, ne traite nullement les « cas d’inversion, d’efféminement et de sodomie ». Ce qu’il ramasse ainsi sous un intitulé rapide et non explicité pour mieux l’évacuer de son propos semble, à nos yeux, affaiblir ce dernier et déplacer seulement la limite de tolérance, ne repousser qu’un peu le cercle de l’exclusion. André Gide souhaite défendre « l’amour grec » contre la théorie du « troisième sexe », lancée en Allemagne par Hirschfeld. Mais, avant de nous gausser, songeons qu’aujourd’hui Gide serait tout simplement classé, par l’ignorante doxa de notre temps, parmi les « pédophiles », lui qui aimait surtout se livrer à des jeux de mains, tenus pour vilains, avec des adolescents et pas uniquement avec de petits Arabes sous protectorat ! À chaque époque sa phobie ! cela n’interdit pas de lire en faisant la part des moments et de leurs préjugés.


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Calvino : Gli avanguardisti a Mentone
Ettore JANULARDO
Né à Santiago de Las Vegas, près de La Havane, Italo Calvino est revenu en Italie dès l’âge de deux ans, à San Remo. Membre du Parti Communiste et de la résistance italienne durant la guerre, il publie en 1947 son premier livre, Le sentier des nids d’araignée, grâce à Cesar Pavese, et rejoint l’équipe de l’éditeur Einaudi. L’« écureuil de la plume » publiera en 1951 le premier volume de ce qui deviendra la « trilogie des Ancêtres », le Vicomte pourfendu, et lui vaudra une célébrité précoce et durable. Il entre en 1956 en opposition avec la politique culturelle du Parti communiste italien, et, après l’intervention soviétique en Hongrie, quitte définitivement le Parti. Ami de Raymond Queneau, il traduisit en italien les Fleurs bleues. C’est au cours des années d’« ermite » où il vécut à Paris, de 1967 à 1980, qu’il rejoint l’Oulipo, en 1973 précisément. En été 1985, alors qu’il travaillait sur les conférences qu’il devait donner à Harvard, il est victime d’une série d’attaques cardiaques. Il meurt à l’hôpital de Sienne dans la nuit du 18 au 19 septembre 1985. Hervé Le Tellier - Site de l’OULIPO.

C’est en 1953 qu’Italo Calvino (1923-1985) publie pour la première fois son conte Gli avanguardisti a Mentone . Les vingt-cinq pages de cette évocation juvénile sont comprises dans un triptyque paru en 1954, L’entrata in guerra  (L’entrée en guerre), qui aurait dû constituer le noyau central d’un roman sur les années de la Seconde guerre mondiale et qu’on pourrait considérer un “à part” dans l’œuvre de l’écrivain italien.

L’histoire du jeune protagoniste – à travers lequel s’exprime l’expérience autobiographique de l’auteur – se situe en septembre 1940 sur le fond d’une Riviera italienne en voie de transformation. Comme indiqué par Calvino dans ces pages, et également dans d’autres remarques biographiques et critiques, San Remo et ses environs sont en train de perdre leur connotation de station touristique cosmopolite pour changer de statut : après le dernier conflit mondial, ils vont devenir “un endroit” de la banlieue de Turin ou de Milan, des lieux à haute frequentation pour des voyages ordinaires. Mais pour l’instant, à l’époque du conte de Calvino, le paysage de la Ligurie n’est que l’arrière-plan d’un scénario de guerre, celle franco-italienne de l’été 1940, elle-même campagne militaire secondaire dans le contexte du conflit européen.

Le protagoniste est donc un réfléchi jeune homme de dix-sept-ans, comme tous les garcons de son âge engagé dans une des organisations de la jeunesse fasciste, les “Avanguardisti”. Tout en menant une vie paisible dans les rues de San Remo – où même le black-out semble devenir une mode amusante pour les promenades du soir –, il connaît quelques uns des enjeux militaires de cette époque et a l’occasion de remarquer des flux de réfugiés italiens qui fuient leurs maisons pour se mettre à l’abri. Lorsqu’on souligne dans le conte que les propriétés de ces réfugiés ne sont pas épargnées par des voleurs capables de profiter de tout malheur, on assiste déjà à l’introduction d’une note dramatique dans un contexte presque vacancier pour le jeune homme.


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Interprétation de l’écriture de proximité chez Yvette Z’Graggen
Cynthia BIRON COHEN
Je suis restée longtemps à la regarder, plusieurs fois j’ai essayé de m’en aller et de rejoindre les autres, mais je suis revenue en arrière. Me souvenir d’elle, je pensais, ne jamais l’oublier. Il y avait aussi autre chose : les yeux de Jozefa, fixés sur moi, me posaient des questions. Et même si ces questions naissaient, en réalité, au fond de ma conscience, elles n’en étaient pas moins pressantes. Pas moyen de les éluder. Que faisais-tu pendant que je mourrais à Auschwitz ? Et puis : que savais-tu de nous ? Yvette Z’Graggen

« Ecrire comme on épluche une orange », « enlev[er] la peau qui recouvre le monde », « pel[er] avec un art tout particulier, enlev[er] de la pointe de son couteau la fine peau blanche qu’on laisse en général subsister », faire apparaître le monde « nu comme l’orange, saignant comme elle, magnifique comme elle »[1]. C’est en ces termes qu’ Yvette Z’Graggen définit son activité esthétique. La comparaison est d’autant plus intéressante qu’elle renvoie, bien au-delà de sa signification esthétique, à toute une vision du monde. En effet, pour cette romancière genevoise, née en 1920, lauréate de nombreux prix littéraires[2], il ne s’agit pas seulement de vaincre la distance entre les événements et l’écriture, mais aussi et surtout de ne rien cacher, de tout dévoiler. Le rapprochement de l’ « orange » et du « monde », par ailleurs, montre que pour l’écrivaine l’expérience esthétique ne relève guère d’une généralisation abstraite, mais au contraire de la primauté du concret et du rapport du particulier et de l’universel, comme si ce dernier ne se pouvait se révéler qu’à travers les objets ou les comportements sociaux des individus.

C’est cette approche du quotidien par une écriture qui tente d’accéder de façon directe à une représentation du monde et des hommes, que mon étude se propose d’analyser dans quelques-uns des ouvrages de la romancière. Inspirées des notions d’esthétique et de sociologie sur le "proche" de l’écrivain et penseur Walter Benjamin (1892-1940), mes réflexions se rapporteront principalement à l’activation de la mémoire (mémoire individuelle, familiale ou culturelle), ainsi qu’à la dimension sociologique et éthique de l’observation du détail. Mon propos n’est certes pas de faire un rapprochement entre Z’Graggen et l’auteur du Livre des Passages (1935), qui en tant que philosophe a cherché à mêler la métaphysique à la vie courante, le théologique à la vie triviale. C’est seulement en vertu de sa vision esthétique qui traite du rapport étroit de l’art et la vie en mettant en évidence les objets et les détails urbains, que je me réfère à Walter Benjamin.


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Ratimir PAVLOVIC
La pensée créative et scientifique contemporaine
En souvenir de la très belle conversation que nous avons eue sur le stand de Luciano au Salon du livre de Paris 2008

MÉLIS Éditions - Entretiens, essais

Cette oeuvre fondamentale a pour mission, entre autres nombreuses ambitions, de présenter plusieurs découvertes de Ratimir PAVLOVIC, en matière de littérature, de sciences et d’art, tout en célébrant d’autres esprits qui ont marqué puissamment notre temps et qui font partie de la Pensée créative et scientifique contemporaine française et mondiale. Tout ce Florilège de la Pensée nouvelle, qui triomphe du passage du Temps, est destiné à tous les niveaux d’Enseignement littéraire, scientifique et philosophique ainsi qu’à un plus large public.

Destinées par Patrick CINTAS

suivi de Luciano MELIS éditeur
par Bernard MAZO

La langue française veut que l’art et la science soient nettement différenciés comme deux activités portant sur deux champs du savoir qu’il ne serait pas possible de confondre : le beau, qui peut être imaginaire et rester beau, et le réel qui n’est pas imaginable et qui peut être laid. Ailleurs, on parle d’art pour désigner la science et on n’y voit aucun inconvénient. Mais si Ratimir PAVLOVIC n’a pas trouvé les fondements de sa pensée dans cette langue qu’il vénère et honore, il ne semble pas non plus que les flous artistiques et scientifiques pratiqués en terre étrangère l’aient beaucoup inspiré. Sa pensée est originale.

Ce livre qui donne la parole aux autres à la condition qu’ils soient éminents et savants est aussi un autoportrait, bien loin de l’autobiographie et si proche de la philosophie qu’il ne peut être écrit que par un poète. « Toute pensée innovatrice ou porteuse d’originalité est créative et scientifique en même temps. La révélation d’une découverte scientifique, par sa nouvelle signification, nous apporte sa nouvelle théorie. Il en va de même pour toute innovation artistique. Il y a une interférence créative entre l’art et la science au niveau de leur signifiant respectif. De ce fait, l’ensemble du patrimoine intemporel artistique et scientifique peut être considéré en tant que Pensée créative et scientifique contemporaine, suggestive ou palpable. »


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La métamorphose dans Les ailes du silence de Rachid Mansoum
Monsif OUADAI SALEH
Toute véritable poésie ne peut que déroger à la rédemption pour l’adoption inconditionnelle de soi, et ce à travers toutes les infidélités éthiques, pneumatiques et esthétiques de la beauté et de la métamorphose. C’est bien là, je trouve, l’enseignement sapiential de cette poétique de la communion et de la conciliation. Cette poétique de la complicité totalement incarnée dans la transsubstance enseigne à la nature sa liberté la plus foncière, débride les forces originelles pour les concilier et consigner l’éthique et le logos à l’écoute de la métamorphose.

Les ailes du silence est un recueil qui vient de naître dans l’immense parchemin de la poésie, non pas comme une intrusion qui profane inutilement la page de la discrétion, ou comme intermission dérisoire du sommeil, de l’intimité légitime de la création, se faisant les ailes du feu par usurpation, mais comme parole à la fois sobre et authentique ayant dénoué et renoué ses propres mystères, scellé ses propres feux, forgé ses propres contradictions et trahi sa propre voix au-delà de l’intimité du silence et au-delà toute figuration aptère de l’imagination. Comme l’indique le premier mot dans le titre ce recueil vient pour conduire la parole poétique vers l’authenticité féconde de la matrice céleste : voix et rose, silence et voix, rose et feu, feu et vin ; voix de l’opacité et du mystère traduisant l’absolu par le silence du vin, seule matière vivante capable de discerner dans la nébulosité le discours de l’âme. C’est un recueil qui déplace sur les ailes des papillons les forces aveugles, tenaces mais désabusées, de l’Omphalos afin de renouer avec l’épanouissement génétique de la "rose céleste", épanouissement signifiant compréhension et perte dans la métamorphose, et réhabiliter par l’enracinement génétique de la révélation, de l’envol, les ténèbres telluriques de la chute. Le recueil met le « silence du vin » à la trace de la perte du silence. Ainsi prennent naissance le miroir du silence, l’écriture, l’imaginaire, la poésie pour pétrir la glaise de la mémoire et mettre le feu dans l’inconnu pour une métamorphose éternelle de la création, pour une métamorphose insaisissable qui se dissout en elle-même à l’image du vent, de l’air et de l’eau, à l’image du silence :

Sois rose mon poème !

une rose aux lèvres du vent. Sinon,

sois un pays mon poème !

un pays qui flotte dans l’air. Sinon,

sois pain mon poème !

pain pour des poissons volants. Sinon,

sois silence mon poème


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Ajar et Dieu
Samir MESTIRI
Ma civilisation héritière de Dieu, a prêché aussi le respect de soi, c’est-à-dire le respect de l’Homme à travers soi-même.[1] - Saint-Exupéry

Le désir d’être affranchi de toute forme d’autorité est au cœur de l’esthétique ajarienne. Refusant de subir son propre destin ainsi que le déterminisme totalitaire des religions, le personnage ajarien cherche « une sortie »[2] salvatrice au moyen de l’ironie. Il s’agit donc d’étudier le rapport qu’entretient l’écriture biaisée d’Ajar avec la vision d’un Dieu autre que celui qui est garant de l’ordre, du sérieux et du définitif, ainsi que les moyens qu’elle met en œuvre pour se libérer du poids des contraintes religieuses ou autres.


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James NOEL
Entretien au Salon du livre de Paris 2008

photographie de ©2008Jean-Claude Cintas

Le sang visible du vitrier de James NOEL est publié chez CIDIHCA. Poèmes à double tranchant est publié aux Éditions Farandole.

Catalogue de mode
Andy VÉROL

# Dans La Peau Des Doigts

Extrait musical : Burial : Ghost Hardware

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...Puis j’ai éteint la lumière... La veilleuse jolie éclairait encore la terre et l’échelle pleine de sang...

Texte complet : J’ai chopé l’échelle en bois, me suis planté une ou deux échardes dans la peau des doigts, et je l’ai éclatée à l’horizontal dans la face de ce gosse-roi... Puis j’ai éteint la lumière... La veilleuse jolie éclairait encore la terre et l’échelle pleine de sang... C’est ça ?

Ocho poetas jóvenes brasileños
Léo LOBOS

Selección y nota : Claudio Daniel

Traducción : Leo Lobos

José Kozer (La Habana, Cuba 1940), en conocido ensayo sobre el neobarroco, apunta dos líneas de creación en la poesía latinoamericana : una coloquial, basada en las técnicas ya bien asimiladas del modernismo del siglo pasado (Pablo Neruda (Parral, Chile 1904 - Santiago, Chile 1973), Nicanor Parra (San Fabián de Alico, Ñuble, Chile 1914) entre otros) ; y otra, más excéntrica, que dirige su atención al trabajo refinado con el lenguaje, que aborda la investigación léxica y metafórica, en la fragmentación del discurso, en la mezcla de múltiples referencias históricas y culturales en la elaboración de una sitaxis muchas veces discontinua, analógica (tendencia que parte de Cesar Vallejo (Santiago de Chuco, Perú 1892 – París, Francia 1938), Oliverio Girondo (Buenos Aires, Argentina 1891-1967) y José Lezama Lima (Campamento de Columbia, La Habana, Cuba 1910 - 1976). Esa división, que ocurre en la América de lengua española, puede ser constada también en la poesía brasileña y norteamericana, a pesar de las diferencias entre ellas. Para ocuparnos del caso brasileño, tenemos hoy autores que escriben como si estuviesen en la década de 1930, “masticando lo masticado”, repitiendo fórmulas de Manuel Bandeira (Recife, Pernambuco, Brasil 1886 – Rio de Janeiro, Brasil 1968) y Carlos Drummond de Andrade (Itabira do Matto Dentro, Minas Gerais, Brasil 1902- Rio de Janeiro, Brasil 1987) (ya bien diluídas por la Generación Mimeógrafo, en la década de 1970) ; mas tenemos también autores que parten de otra tradición, del trobar clus de Murilo Mendes (Juiz Fora, Minas Gerais, Brasil 1901- Lisboa, Portugal 1975), João Cabral de Melo Neto ( Recife, Pernambuco, Brasil 1920 - Rio de Janiero, Brasil 1999) y Haroldo de Campos (São Paulo, Brasil 1929 -2003), apostando sus fichas por una poesía más elaborada, de investigación formal. Son poetas jóvenes, muchos de ellos entre los veinte y los treinta años, apasionados por el “poder encantatorio de las palabras”, por las arquitecturas más complejas del sonido y la imagen, más allá del registro fotográfico de lo cotidiano o de la parodia de la crónica periodística. “El lenguaje es nuestra realidad”, parecen decir estos autores, que leen a Paul Celan (Czernorwitz, Rumania 1920 -1970), Robert Creeley (Arlington, Massachussets, USA 1926 - Odessa, Texas, USA, 2005), Coral Bracho (Ciudad de México, México 1951), himnos chamánicos y cómics. Ellos saben la importancia de la Poesía Concreta, del Neobarroco, del Language Poetry, no rechazan el diálogo con esas tendencias inventivas, pero tampoco rechazan la presencia del Pop. Sí, ellos escuchan música erudita, mas también el rhythm and poetry y rock and roll. Gustan del cine, sin dejar de navegar en la Internet y de explorar vehículos como el blog o el Orkut, ampliando sus redes de comunicación virtual con otros poetas. Crean revistas “de papel” y electrónicas, se desarrollan en el campo del videoarte. En fin, son autores actualizados, que insisten en vivir su tiempo, con derecho a explorar todas las posibilidades ofrecidas por la tecnología, verbal y no verbal, para la creación en nuestra época. Con certeza, aún es muy temprano para cualquier tentativa de registro o de interpretación de lo que está siendo creado por ellos ; será necesario, por lo menos, un distanciamiento crítico otorgado por el tiempo, para evaluar la evolución de su trabajo. Nuestra intención, en esta breve muestra, es apenas presentar ocho de esos poetas, que comienzan a destacar por su inquietud y originalidad : Simone Homem de Mello (SP), Ruy de Vasconcelos (CE), Jorge Lúcio de Campos (RJ), Lígia Dabul (RJ), Virna Teixeira (CE),  Franklin Alves (RJ), Eduardo Jorge (CE) e Adriana Zapparoli (SP).


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Rotonda de gatos ilustres
Francisco AZUELA

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Caminantes de espejos

Prólogo de Patrick CINTAS

Francisco AZUELA es uno de estos poetas que se miran en un espejo, lo que sin duda no les diferencia del común de los mortales tanto los espejos existen en nuestro lugar, pero, alejándose de este triunfo de lo vulgar, ve allí sólo la sombra de lo que es y de lo que desde hace tiempo intenta hacer existir o más exactamente dar a la existencia. Es más que un matiz.

Para el que leyó su poesía, la cual se deriva sin cesar del primer libro, El Maldicionero, estos cuentos de gatos, que finalmente forman la novela, no se alejaron de ella tanto como lo parecería a primera vista. La búsqueda es la misma : no esta perfección cuya búsqueda es una ilusión de artesano y pues de bienpensante, pero esta exigencia que echa la culpa a la lengua como si ella fuera responsable ante la literatura y no lo contrario. El contenido, de resultas, es propulsado fuera del estilo, del saber, de la autobiografía y de las ideas útiles. Resulta, hasta antes del placer, el desfastidio tan necesario para nuestra tranquilidad de observador y de observado, de objeto-sujeto. Y es un objeto, finalmente definible, que Francisco AZUELA consigue promover en nuestro espacio telúrico presa de fiebres de poder y de goce.

Esto se lee como una novela, los gatos evidentemente no son unos gatos y el mundo que atraviesan como compañeros o parásitos de la sociedad es el mundo que nos pertenece por poderes. De este poder, de este mandato y algunas veces de esta misión, alimentamos demasiado nuestro espíritu, tomando el riesgo de pasar finalmente por unos minus habens, lo que no somos y que nos hacemos por abandonarnos a las religiones y otras doctrinas del orden y del poder. Pero viajar con gatos que se nos parecen, e incluso algunos se parecen a Francisco AZUELA, lejos de condenarnos a la lección recibida y transmitida, nos aparta, como jugadores cansados y cansados de jugar y de ser juguetes. Sin contar que todos los demás gatos se parecen a criaturas que Francisco AZUELA sin duda mucho conoció.


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Nous avons aussi mis en ligne:

Anthony James RAMOS VARGAS - Dos poemas
Harmonie BOTELLA - Historia
Eugenia DELAD - Le secret d'une reine de sagesse
Gabriel IMPAGLIONE - La poesía nace con el hombre
Hervé MARTIN - Une forme de corps
Homero CARVALHO OLIVA - Los Reinos Dorados
Jean-Pierre LESIEUR - Tu vis survis et meurt peut-être… mon frère de joug dans les lettres
Juan José CANTÓN y CANTÓN - Flashes
Antonio LEAL - Tigre
Leoncio LUQUE CCOTA - Poética
Oscar PORTELA - Angel y demonio - La busqueda - Gelman. Los premios : la exclusion y el poder de los incluídos - Un tango tropical ... De tres por Abel Posse
Patricio Armando SANCHEZ - L'amphore ailée
María Eugenia CASEIRO - La muerte de Benito
Kathy FERRÉ - Au Gré du Vent
Éric DUBOIS - Poèmes
Niculina OPREA - A l'abord définitif et autres poèmes
Parviz ABOLGASSEMI - Le ciel ouvre ses bras brillants
Marta ROLDÁN - Crecer en el intento
Maritza Luza CASTILLO - Poemas


NOUVELLES DU
CHASSEUR ABSTRAIT



CAHIERS DE LA RAL,M


 

CAHIERS DE LA RAL,M nº 9

Ceci n’est pas une série !
Appel à contribution
« Le hasard crée ce qui deviendra significatif. » Ferdinand de Saussure.

Georges AYVAYAN - Série 2005


Dans le cadre des préparations du tricentenaire du signifiant « série », la RAL,M prépare un cahier de mélanges qui nécessite l’implication de tous ceux qui, quel que soit leur domaine d’activité, ont fait, à un titre ou un autre, l’expérience de la série.

Rappelons quels cahots ont traversé l’histoire de ce mot, apparu dans la langue à l’aube d’un âge qui allait devenir industriel, au risque de se faire miroir d’une vision de plus en plus déchirante de l’humanité.

1715 : le mot est traduit du latin pour décrire, en mathématiques, les suites infinies de Leibniz.

1767 : Denis Diderot évoque une « vieille série d’impressions », rendant au mot une acception plus large, plus ouverte et ambiguë du mot : « suite, série, succession ».

1809 : Lamarck veut voir dans la classification des espèces naturelles une « véritable série ».

1828 : Charles Fourier, convaincu que la série définit la structure de l’univers, veut doter la société d’une organisation de même nature.

1840 : Gérard de Nerval, en marge d’Aurélia, note : « Les ordres ont le secret — transmis des pères aux fils. C’est la sympathie humaine. Les esprits sont étagés dans les mondes et se correspondent. La l (oi) inv (isible) qui s’occupe des destinées des h (ommes) à différents degrés — sur le rapport de chaque série et sans rien changer. »

1862 : Proudhon se définit comme « un simple observateur et chercheur de séries »

1909 : Claude Monet présente « Les Nymphéas, série de paysage d’eau ».

1946 : René Leibowitz introduit en France les principes de la « composition avec douze sons », autrement appelée « musique sérielle ».

1963 : Pierre Boulez publie « Penser la musique aujourd’hui », rendant les conclusions d’une expérience radicale de la série, dite « généralisée ».

1984 : Henri Meschonnic formule une première proposition relative à un principe opaque, la « sémantique sérielle ».

1997 : Paul Bleton expose les principes d’une « lecture sérielle ».

Philosophie, art, littérature, musique, industrie, administration, sport, télévision, électricité, informatique, archivistique, crime. Aucun secteur n’est épargné par le principe de la série, principe aveugle et sans a priori. 

Or, trop longtemps, la série est restée un oeil conceptuel posée sur la réalité. Le projet de la RAL,M, à travers ce cahier, n’est pas d’accumuler des témoignages épars sur un thème soumis, plus que tout autre, à l’alea et l’accident, mais de produire une critique de la série, en la mettant à l’épreuve des faits, du réel, des pratiques.

Vos contributions sont sollicitées. Votre expérience de la série nous est précieuse.

Pascal LERAY

Seulement
Atelier d’écriture
de Rodica DRAGHINCESCU

L’écriture est un long dialogue avec soi-même ... apud Nathalie Sarraute

Bien sûr, il y a des gens qui écrivent pour seulement écrire et communiquer, écrire et partager leur écriture. D’autres écrivent sans rien se proposer. Ecrire dans l’enchantement d’écrire. Ecrire. Pour accoucher de soi-même sans douleurs. Accoucher le soi-même de soi-même sans douleur. Ou l’accoucher de l’Autre qui simultanément nous accouche de lui-même ! Inventer la posologie du sens unique mais pourtant commun. Créer des liens, nourrir l’Autre et s’en nourrir.

 Ecrire ? Il y a quelques décennies le journal Libération demandait à des écrivains de renom pourquoi ils écrivaient  ? A cette question encore à la mode, Samuel Becket répondit : « Bon qu’à ça » Eloquent, son humour noir et définitif avait résumé le fond et la forme d’une pensée et d’une œuvre à part.

Ecrire c’est créer une présence, remplir ce qui nous manque. « Tout commence à partir de ce manque » dit le poète belge Eric Brogniet. Ecrire. Sur le vide de la vie ? Sur la vie du vide ? Décrire le vide plein, l’absence noire. Redéfinir le vide vidé, l’absence blanche. Ecrire de la poésie ou de la prose ? Qu’importe ?! La poésie protège les mystères des prosateurs, elle les garde chiffrés mieux que tout autre énoncé. Les poètes habillent et habitent les frontières des vérités (absolue et relative), (ren)forçant le fini par l’infini et le visible par l’invisible. Leur nature est non de dissimuler mais bien de laisser deviner leurs symboles. Car qu’est la culture sans poésie ? L’humanité sans poésie est une fin quelconque.


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CAHIER Nº 7
DIRE LE TEXTE

Télécharger gratuitement le Cahier intégral

Voir notre numéro de mars (nº 36) pour écouter et télécharger toute la musique de DIRE LE TEXTE (8h environ)

avec Pascal LERAY, Jack YANTCHENKOFF, Valérie CONSTANTIN, Jean-Claude CINTAS, Marta CYWINSKA, ROBERT VITTON, Marie SAGAIE-DOUVE & Patrick CINTAS.

Trouver un distributeur de livres n’est pas difficile. Par contre, assumer la diffusion des livres, avec ce que cela suppose d’investissement publicitaire, est une galère que les éditeurs de notre taille n’ont pas les moyens de lancer à l’aventure du marché considéré comme un océan de difficultés en tous genres.

D’autant que le concept de diffusion est dépassé par la réalité des réseaux. De quoi a besoin un éditeur sur ce terrain glissant des contacts et des argumentaires ? D’abord d’une bonne base de données facile à joindre et à consulter. Dilicom et Google-Livres répondent à cette demande. Puis, il faut un distributeur. Calibre et Amazon semblent aussi apporter de l’eau au moulin de l’éditeur à moindre coût et surtout dans un confort assez remarquable. Mais ceci et cela ne suffisent pas. Il faut aussi diffuser, ou mieux communiquer. Les tarifs de communication sont, en France, tout le monde s’en aperçoit, plutôt élevés. L’éditeur a donc tout intérêt a créer sa propre agence de communication.

Le cas du Chasseur abstrait est exemplaire. Cette maison d’édition s’est construite sur un site internet, un des plus fréquentés de l’aire francophone et hispanique : la RAL,M ici présente. Personne ne contestera le pouvoir de communication de cet outil devenu énorme et très efficace. Les Cahiers de la RAL,M extraient régulièrement le meilleur de la RAL,M. Sept Cahiers publiés à ce jour et autant en préparation.

Ce septième Cahier met en jeu l’atelier de lecture, DIRE LE TEXTE, auquel huit auteurs ont bien voulu participer.

Nous serons bientôt en mesure de présenter, avec autant de matière et de savoir-faire, le pendant de l’atelier de lecture, c’est-à-dire l’atelier d’écriture que nous avons intitulé CORTO, à cause de la brièveté de ses publications, et que nous inaugurerons à Rodez au cours des Rencontres poétiques.

CAHIERS DE LA RAL,M nº 8
HAÏTI

Le Cahier "HAÏTI", préfacé par Jean METELLUS, sera présenté au 18e Salon de la revue à Paris les 11-12 octobre 2008. Un monument de plus de 600 pages de littérature et d’art avec trois générations de poètes et d’artistes haïtiens, dont Alex Laguerre, André Fouad, Angie Fontaine, Anthony Phelps, Armoce Duge, François Avin, Chay Nanm, Coutechève Lavoie Aupont, Damas Porcena, Doc Wor, Dominique Batraville, Duccha, Duckens Charitable, Elsie Suréna, Emilie Franz, Emmelie Prophete, Ferol Hugues Berthin, Frankétienne, Fred Edson Lafortune, Fritzner Lamour, Gary Klang, Jacques Ravix, Jean Dany Joachim, Jean Davidson Gilot, Jean-Emmanuel Jacquet, Jean-Francois Toussaint, Jean-Louis Sénatus, Jean Métellus, Jean-Pierre Jacques Adler, Jean-Marc Voltaire, Josaphat-Robert Large, Josenti Larochelle, Joseph Casseus, Joseph Edgard celestin, Juste Jonel, Kanga, Keven Prevaris, L’atelier Le vide, Makenzy Orcel, Marc Exavier, Marie-Alice Théard, Mario Benjamin, Mathurin Rodolphe, Pierre-Max Freesney, Michèle Voltaire Marcelin, Nadol’s, James Noël, Pascale Monnin, Pierre James, Pierre-Moïse Célestin, Pierre-Pascal Merisier, René Dépestre, Rodney Saint-Eloi, Romilly Emmanuel Saint-Hilaire, Sergine André, Sterlin Ulysse, Stivenson Magloire, Syto Cavé, Walner O’Registre, Tomy M.Day…


SALONS


 

Salon du livre de Paris
Marquons la différence
« Les petits éditeurs prennent trop de place en librairie et au Salon du livre. »
Antoine GALLIMARD.

La photo (de ©Jean-Claude Cintas) est parodique...

Hervé FERRAGE, directeur du Centre régional des Lettres Midi-Pyrénées, n’est pas "partisan" des performances d’auteur sur le stand. Pourtant, Marta CYWINSKA, Pascal LERAY et Jean-Claude CINTAS ont témoigné que non seulement ils pouvaient attirer du monde, et du meilleur, mais qu’ils sont doués de ce talent somme toute rare qui consiste à donner de la voix pour faire entendre le texte.

Le texte y gagne en proximité, et l’on sait à quel point le texte littéraire a besoin de cette proximité faite d’approche et d’échange. L’atelier de lecture du Chasseur abstrait n’est rien d’autre que cette tentative de dire au lecteur que la poésie sait par nature l’engager à la suivre dans son voyage au-delà des normes itinérantes et des satisfactions grossières et grossièrement taillées dans la matière immobile et approximative des déplacements du sens commun.

Car le sens ordinaire, quand ça se déplace, c’est en rond, autour d’un piquet, la corde au cou et les pieds dans le plat. Tandis que la poésie, où qu’elle se soit formée, sans doute au hasard des rencontres et des cisaillements, la poésie n’a pas de limite, en tout cas pas de limites tolérables. Tout texte qui en dit plus long qu’il n’est écrit n’est pas un poème. Il faut ajouter du sens au sens, certes, mais cela ne va jamais plus loin que l’expérience et la leçon. Ce qui dépasse forcément le texte, c’est sa voix.

Ici, la voix n’est plus la question de savoir si on a compris ou s’il faut éviter de recommencer pour ne pas envenimer le rapport du texte à celui qui le reçoit dans un moment de petite curiosité légitime. La voix, alors, si elle est ce qu’on attend de sa promesse, est le seul véritable moyen de pénétrer sans toucher aux délicates surfaces de la peau, ce qui pourrait choquer, on s’en doute. Une voix s’adresse directement au cerveau, sans trouer nécessairement les plans de peau et d’organes que nous soumettons à d’autres solitudes finalement moins charnelles.

Pourquoi le livre en papier perdure-t-il ? Insolence des désirs de palper au lieu de comprendre. Nous ne soumettons pas le texte à des emplois tels que le dessin ou la musique. Il n’est pas le commencement ou le prolongement. Nous n’avons songé qu’à demeurer poètes tout en nous approchant de ce lieu, apparamment indifférent au temps, où le livre est emporté comme témoignage pour être relu avec peut-être la même insistance de tessiture.

Patrick CINTAS


Voir le reportage photographique 

Une nuit qui n’en finit pas d’être creusée
Le thème des Journées Poésie
Rodez 9-11 mai 2008
« …le poème qui se sera cherché à travers nous, qui nous aura détachés du chaos, qui nous aura menés au dos de l’espace, silhouettes sans appui, incertaines, émerveillées… » - Françoise Hàn.

L’écriture du poème surgit-elle à ce point de contact entre ce qui arrive et celui qui l’éprouve ? S’écrirait-il comme ça, bref, multiple, discontinu comme les événements et la rumeur du monde ? Mais qu’est ce qui arrive ? De quels lieux, à quelles voix, à quel fracas, à quels cris sommes-nous attentifs ? De quels autres réels les poètes sont-ils les témoins ? Quelle urgence à écrire ?

journees-poesie-rodez.net

Le chasseur abstrait participera au marché de poésie de ces Journées où le public pourra rencontrer les auteurs invités : Jean-Baptiste Para, Françoise Hàn, Mathieu Bénézet (prix Artaud 2006), Patrick Wateau (prix Artaud 2007), Hélène Sanguinetti, Claude Mouchard, Jong N.Woo, Joël Bastard, Alain Lambert, Michael Glück. Un hommage sera rendu à Françoise Hàn.

Nous présenterons nous-mêmes les poètes et artistes que nous publions dans nos collections : Pascal LERAY, Jack YANTCHENKOFF, Valérie CONSTANTIN, Jean-Claude CINTAS, Marta CYWINSKA, Serge MEITINGER, ROBERT VITTON, Marie SAGAIE-DOUVE, Patrick CINTAS, François RICHARD, Abdelmajid BENJELLOUN .

Nous espérons que le Cahier "HAÏTI", premier volume des anthologies de la RAL,M, sera bouclé à temps. Préface de Jean MÉTELLUS, avec : Alex Laguerre, André Fouad, Angie Fontaine, Anthony Phelps, Armoce Duge, François Avin, Chay Nanm, Coutechève Lavoie Aupont, Damas Porcena, Doc Wor, Dominique Batraville, Duccha, Duckens Charitable, Elsie Suréna, Emilie Franz, Emmelie Prophete, Ferol Hugues Berthin, Fred Edson Lafortune, Fritzner Lamour, Gary Klang, Jacques Ravix, Jean Dany Joachim, Jean Davidson Gilot, Jean-Emmanuel Jacquet, Jean-Francois Toussaint, Jean-Louis Sénatus, Jean Métellus, Jean-Pierre Jacques Adler, Jean-Marc Voltaire, Josaphat-Robert Large, Josenti Larochelle, Joseph Casseus, Joseph Edgard celestin, Juste Jonel, Kanga, Keven Prevaris, L’atelier Le vide, Makenzy Orcel, Marc Exavier, Marie-Alice Théard, Mario Benjamin, Mathurin Rodolphe, Pierre-Max Freesney, Michèle Voltaire Marcelin, Nadol’s, James Noël, Pascale Monnin, Pierre James, Pierre-Moïse Célestin, Pierre-Pascal Merisier, Rodney Saint-Eloi, Romilly Emmanuel Saint-Hilaire, Sergine André, Sterlin Ulysse, Stivenson Magloire, Syto Cavé, Walner O’Registre, Tomy M.Day.

Notre présentation dans le hall de l’Auditorium de musique :

Édition :


Les livres de poésie de Pascal LERAY, Jack YANTCHENKOFF, Valérie CONSTANTIN, Jean-Claude CINTAS, Marta CYWINSKA, Serge MEITINGER, ROBERT VITTON, Marie SAGAIE-DOUVE, Patrick CINTAS, François RICHARD, Abdelmajid BENJELLOUN.

Les Cahiers de la RAL,M, notre revue. 8 numéros.

Nos livres d’artistes.

Installations :


Nous présenterons nos propositions d’installations en salle (sans pouvoir les installer, mais on pourra consulter les maquettes).

Hiboux 68 ou Les nuits rouges de Robert VITTON - Dit de Jean-Claude CINTAS - Images de Valérie CONSTANTIN - musique de Patrick CINTAS.

Les enfants n’aiment pas la mort - Dit de Jean-Claude CINTAS - texte et musique de Patrick CINTAS - images de Valérie CONSTANTIN.

Qu’es-aco ? de Robert VITTON - Dit par l’auteur - images de Valérie CONSTANTIN.

Dix mille milliards de cités pour rien de Patrick CINTAS - Dessins et musique de l’auteur.

Portrait de la série en jeune mot - Dit par l’auteur - images et musique de l’auteur.

Loire sur Tours de François RICHARD - photographies de Christophe LAURENTIN.

Ateliers :


Creuset à la fois de notre production éditoriale et de nos installations, les ateliers forment le coeur de notre projet sans cesse remis à l’ouvrage. DIRE LE TEXTE, notre atelier de lecture, a été présenté avec succès au Salon de Paris en mars dernier. À Rodez, nous présenterons en particulier notre atelier d’écriture et sa collection CORTO.

Nuit qui n’en finit pas d’être creusée selon les uns ou nuit battue à mort selon Char cité par Blanchot (Le livre à venir), nous espérons vous y rencontrer nombreux et toujours prêts à nous lire sans limite de temps ni de lumière.

 


Communiqués de Presse :

 

Blog de news

 

 

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Prochain numéro le 15 mai 2008.
après les Journées Poésie de Rodez
http://journees-poesie-rodez.net/

2004/2024 Revue d'art et de littérature, musique

publiée par Patrick Cintas - pcintas@ral-m.com - 06 62 37 88 76

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