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Sonnette
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 Article publié le 11 mai 2025.

oOo

Quand sous les belles myriacées

Je m’en vais baiser rose cul

Abrité sous des rameaux feuillus

Ô doux parfums des malvacées

 

Mammouth je tige vert-pogné

Les ardeurs de fente trou nu

Je bande si joli fondu

D’amour vite à m’ensemencer

 

Ô Sacrées-Couilles Foutre-Danse

Bien fol oubliant ma souffrance

Quand mon sexe grand vient pleurer

 

Sur ces culs ces branles ces songes

Menés bon train & main ailée

Qui efface tout telle une éponge

 

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  Sonnette par Catherine Andrieu

Sonnette — Jacques Cauda, l’extase et son effacement

Il est des œuvres qui surgissent comme des éruptions, débordant du cadre trop étroit du langage pour s’incarner pleinement dans la matière du monde. Jacques Cauda ne décrit pas l’érotisme, il le fait éclater en pleine lumière, il le barbouille sur la toile, il l’essore dans le poème jusqu’à l’ultime goutte d’une sève tantôt sucrée, tantôt fangeuse.

Son poème est une montée soudaine, une ivresse de sève et de sang, où les ramures protectrices des arbres deviennent les alcôves complices d’amours sauvages. La nature y est retournée à ses pulsions primaires : elle n’est plus refuge mais complice, épanouissement des chairs sous la brûlure des désirs. Le monde végétal exulte, les corolles des fleurs s’ouvrent comme des sexes humides, dans une offrande perpétuelle à l’appétit insatiable du vivant.

Mais ce poème ne s’arrête pas au seuil de la célébration : il l’enjambe pour plonger dans l’instinct brut, là où le langage se cabre, où les mots eux-mêmes semblent dressés dans la tension du plaisir. C’est une langue qui crisse, qui éclabousse, qui ne se contente plus des formes lisses et convenues. Le verbe jaillit comme un corps en éruption, s’invente des passages, creuse dans la chair de la syntaxe ses propres galeries de jouissance.

Cette tension extrême, cette hâte de vivre avant l’effacement, trouve dans la première toile toute sa démesure. Sur ce fond éclatant de bleu, le chaos s’organise en une procession désordonnée de formes et de couleurs. Les corps s’y arrachent à la pesanteur, s’y perdent dans les traînées vibrantes des rouges, des jaunes, des violets. Tout est là, dans cette confusion : l’élan du désir, l’épuisement à venir, la peur sourde de manquer l’ultime vertige.

Mais dans cette liesse viscérale, déjà perce la mélancolie. L’excès lui-même devient promesse de chute. Le plaisir est trop vif pour durer, il sait déjà qu’il se condamne à l’effacement. Et c’est ainsi que le poème glisse, sans prévenir, dans l’autre rive de l’extase, celle où la plénitude se retire, où la fatigue lourde des corps annonce la fin des danses.

Alors vient la seconde peinture, où la couleur s’est retirée comme une marée basse, laissant derrière elle les ossements d’un naufrage. Les figures y sont réduites à l’essentiel : des contours écorchés, des visages vidés de leur feu, des corps encore dressés mais déjà figés dans l’attente de leur propre disparition. Ici, la peinture ne jaillit plus, elle suinte. Elle ne s’élance plus, elle retient son souffle dans le noir épais de l’après.

Et dans ce basculement du trop-plein vers le manque, de l’ardeur vers l’oubli, s’inscrit la véritable portée de l’œuvre. Cauda ne nous entraîne pas dans une simple bacchanale : il nous fait traverser la fête jusqu’à son silence, il nous montre ce qui reste lorsque le dernier cri s’éteint, lorsque le dernier battement de plaisir se transforme en plainte sourde.

La sonnette, ce n’est plus l’invitation à entrer, mais le dernier écho dans la pièce vide. Un battement lointain, fragile, suspendu dans l’air trop lourd d’un monde qui a tout donné et qui, dans l’épuisement, se retire.

Ainsi s’achève cette traversée : dans l’éclat fracassé de la jouissance, et dans le silence retombé d’une humanité consciente que même ses plus grandes extases ne sauraient la sauver de son propre effacement.


 

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