Et si, après tout, le narrateur était un loup ? Un animal, un être libre qui choisit lui-même ses contraintes ? Faut-il y voir, par ailleurs, la parabole de la nature et de sa toute puissance ? Sans doute. Plus certainement, le même destin que partagent l´homme et l´animal.
Apparemment bâti pour la course ou l´errance – mais les deux vocations ne sont-elles pas les mêmes – je m´apprête à partir. Mon pelage noir et blanc, tacheté par endroits, est parfaitement luisant, témoignant d´une forme optimale. Mon corps est extrêmement robuste. Mes yeux ont une acuité profonde et mon champ de vision dépasse les cent quatre vingt degrés. Mon ouïe est fine, très fine même. Ma transpiration s´effectuant par le biais de ma langue, j´éprouve souvent le besoin de me désaltérer. Il me faudra faire des haltes fréquentes, je suppose. Le moindre de mes mouvements me renseigne sur la totalité de mon corps, ainsi que son métabolisme. Mon esprit est en éveil constant, il ne cesse de sentir, d´observer et de spéculer. Chargé de souvenirs, anciens ou futurs, traversé par l´enchevêtrement des temps et des époques, je me sens prêt.[...]
Dans les autres nouvelles, des analogies sont créées à partir d´impressions esthétiques, de jeux linguistiques parfois traversés par des considérations littéraires, par la voix de la littérature. En opérant de nombreux glissements, la narration rapproche des mondes réels ou fantasmés, au départ éloignés et qui, ensemble, constituent le texte
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Espace de Stéphane Pucheu