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Écos des tatanes (Patrick Cintas)
Le poète assassiné
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Don José sautant sur son sabre - Tonnerre !... il va pleuvoir des coups ! Rien à faire : la poésie ne tue pas. Curieux spectacle que celui du poète authentique qui déballe ses feuillets entre deux étalages de considérations moins prometteuses, voir carrément pédantes ou pire médiocres. Alvus se promenait dans les allées à la recherche d’il ne savait pas trop quoi qui eût de l’influence sur ses jours. Il tomba sur un poète qui savait. Sur la page qu’on lui présentait dans un rayon de soleil, il reconnut des ascendants. Il n’en dit rien et se laissa faire. Il sourit même, pour ne pas dire. Il apprécia le papier, ses charmes influents, son incitation à dépasser le texte même pour aller plus loin. Le poète désignait cet endroit avec un doigt mouillé. L’autre poète, deux tables plus loin, reçut cette offrande avec toutes les apparences de la joie. Alvus s’enquit de sa fortune. L’autre lui répondit par-dessus celui qui était entre les deux. Paroles sans importance, banalités ronflantes, pécadilles de pécore. Et celui qui était entre les deux prenait des notes. Alvus lui sourit, d’un sourire différent, comme s’il comprenait.
« La solution à cette énigme ? La voici : il vous faut deux poètes médiocres ; vous ne les mélangez pas ; ils se mélangent sans vous. » Alvus salua cette impertinence. Il marcha jusqu’à l’endroit où un autre poète recevait des hommages. Il se tourna alors vers celui qui était là-bas, entre les deux. Il semblait dire encore : « Si vous ajoutez le troisème quand les deux autres sont bien mousseux, vous êtes sur le bon chemin : celui du quatrième qui donne un sens à tout ceci. » Alvus sortit de ce marché. Combien faut-il de mauvais poètes pour que ça s’arrête ? Quand revient-on sur ses pas pour reconnaître la vraie poésie sans avoir besoin de saluer tous ces petits nombrils pris de folie verbale ? Un cinquième poète (sans compter celui du milieu) lui dit vertement : Jamais ! Et il se multiplia étrangement dans l’eau grise de la Seine. Non mais des fois ! |
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