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 Article publié le 22 mai 2016.

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Souvent, les périodes sombres sont traversées par la lumière.

Par des totems.

Socrate et son insatiable besoin d’interaction, Socrate et son art du logos rencontrent les événements de son temps, heurtant la conscience conventionnelle de ses juges, tout en affrontant la première guerre civile, connue sous le nom de guerre du Péloponnèse. Pendant que les différends entre Cités-Etats telles que Sparte et Athènes font rage, embrasant largement le territoire grec, non seulement il participe en tant que soldat, mais il assiste, surtout, au délitement de son pays qui, après avoir repoussé l’’envahisseur perse quelques décennies plus tôt, ne parvient à surmonter ses conflits internes. Mais la mémoire demeure, le logos est là, oui, prêts à irradier les autres consciences, à les remettre en cause, à les rendre toujours plus vivantes. « Connais-toi toi-même ».

L’officier Choderlos de Laclos possède du temps, en ces années 1780 au cours desquelles il change fréquemment de garnison, une période où la nation française veut se régénérer, les tensions permanentes entre le pouvoir et le peuple devenant exponentielles. Un temps qu’il utilise à profit pour ériger un miroir, un beau miroir, un superbe miroir, celui de la noblesse française en pleine marcescence. « Les liaisons dangereuses » accompagnent le mouvement inexorable de la Révolution, avec en son sein l’icône bicéphale d’un homme et d’une femme dont l’attraction semble plus forte que les événements eux-mêmes. Le vicomte de Valmont et Madame de Tourvel incarnent la cristallisation suprême, comme si le contexte devenait dissout. Tout au long de ses lettres, Choderlos de Laclos déploie une écriture magnificente, affûtée comme une guillotine. Le chef d’œuvre épistolaire se vend sous le manteau tandis que son auteur donne des conférences sur l’éducation des femmes…

Le médecin Destouches enchaîne les visites en banlieue parisienne, une banlieue où les conditions d’hygiène laissent à désirer, c’est le moins que l’on puisse dire. Dans ses interventions, il est tranchant, rapide, sans hésitation. Tout comme les épisodes de la Grande guerre, qui sont derrière lui, à l’instar, aussi, de sa plume qui relate, dans un style protéiforme composé des registres classique, familier, courant et argotique, la nausée et la folie de ces antérieures années. Les balles fusent autour du soldat Bardamu, les campagnes françaises sont retranchées, désertes, et le commerce, lui, continue. Beaucoup de choses prospèrent en temps de guerre, beaucoup … Bardamu croise et rencontre des dames, des compagnes, Bardamu est sous le charme. L’Afrique, l’Amérique, à nouveau la France … C’est la nausée des années 30, maintenant, dont la deuxième est marquée par l’irruption de « Voyage au bout de la nuit » , signé Louis-Ferdinand Céline, le cavalier. Seul.

La nausée se poursuit, quelques années plus tard, la nausée prend de l’ampleur, de l’épaisseur, avec l’avancée des bottes allemandes sur tout le Vieux continent, la nausée se répand et se creuse, donc, mobilisant des peuples, des nations.

C’est dans ce chaos que surgit Meursault, personnage nouveau, narrateur novateur dont la démarche et l’enveloppe assurent à l’homo sapiens sapiens une nouvelle mutation. « L’Etranger » sort en 1942, il invite à s’interroger sur le devenir de l’homme occidental. Etranger au monde, étranger à lui-même, étranger, surtout, à toute adjectivité. Et familier de bien des sensations nouvelles, à interpréter. Meursault avance dans un monde à refaire, sans qu’il soit possible de véritablement deviner ses intentions. C’est une reprise de la phénoménologie, c’est une reprise de l’envie de vivre, de bâtir, de conquérir … dans un style conjointement simple, audacieux, délavé, dans un style net ou dépouillé diffusant des phrases courtes et définitives qui, au bout du compte, affirment la volonté d’ouvrir le monde. De dégager l’horizon…

 

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