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Article publié le 12 septembre 2021. oOo J’ai de la gaîté dans mon encre, Ma plume court de tous côtés, Ma barque danse sur son ancre. Les beaux étés ! Je n’ai regret à ma jeunesse, J’en ai tant et tant profité, Mes vieux boyaux le reconnaissent. Les beaux étés ! Je vois des rondes d’étamine, Le garnement que j’ai été, L’amoureux fou d’une gamine. Les beaux étés ! J’étais alors vêtu de toile, Un épouvantail picoté, Pestant contre sa bonne étoile. Les beaux étés ! Les beaux étés !
Autour de notre pauvre terre, J’ai couru comme un dératé Entre des séjours à Cythère. Les beaux étés ! Après la panse vient la danse, Mes payses m’ont éreinté, J’ai voulu suivre la cadence. Les beaux étés ! Les plus beaux endroits de ma vie, Je ne les ai pas tous cités Je cède à toutes mes envies. Les beaux étés ! Que de fois, mère, je me laisse, Comme un espiègle enfant gâté, Sans rire, aller à la mollesse. Les beaux étés ! Les beaux étés !
Tous demandent de mes nouvelles, Je deviens une rareté, J’ai mis du plomb dans ma cervelle. Les beaux étés ! Sur ma guitare, j’improvise Des chants longuement médités, Jusqu’à ce que le ciel se brise. Les beaux étés !
On a vingt ans aux barricades, Que de parfums m’ont entêté ! Ce fut toquade sur toquade. Les beaux étés ! Je n’écris que dans le mal être, Dans mes endroits accidentés, Ni cartes postales, ni lettres. Les beaux étés ! Les beaux étés !
Je dis toujours ce que je pense, Pour moi, ma muse a des bontés, J’ai toujours une récompense. Les beaux étés ! Je suis au bout de mon errance, Mes jours et mes nuits sont comptés, Mais je plaisante mes souffrances. Les beaux étés ! Nous sommes au monde pour prendre, Nous permettre des privautés. Nous n’aurons plus notre âme à rendre. Les beaux étés ! J’ai toujours eu mes vieilles lames Dans un manche traficoté, Un Dupont avare de flamme. Les beaux étés ! Les beaux étés !
Je vais parfois en marchandise, J’aplanis les difficultés, Pour me payer des friandises. Les beaux étés ! Poète à la pleine figure, J’ai par amour des vers hâtés, Des goélands de bon augure. Les beaux étés ! Les quais et les ponts sont en liesse, Feux d’artifice à volonté, Les donzelles font des joliesses. Les beaux étés ! J’aurai bu les eaux de Provence, De l’Hippocrène, du Léthé, De la fontaine de Jouvence… Les beaux étés ! Les beaux étés !
Mais que voulez-vous que j’y fasse, Je suis mûr pour l’éternité. Qui donc bâclera ma postface ? Un bel été ! Un bel été !
Robert VITTON, 2021
Note
Aller en marchandise : voyager pour affaires de commerce, au figuré, chercher quelque bon coup à faire.
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