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Article publié le 2 octobre 2022. oOo Poésie, mode d’emploi
Sans doute, le dernier livre de Mathias Richard peut être posé sur la table de chevet auprès de Marelle, de Julio Cortázar, et de Feu pâle, de Vladimir Nabokov. Il s’agit, comme ses illustres prédécesseurs, d’un livre en mouvement, cinétique qui s’accommode d’ailleurs assez peu d’une édition en feuilles de papier agglutinées. Car ce fort volume de plus de 400 pages se manie, à l’instar d’un instrument dont il reste à qualifier la destination. « Je suis un artiste, y trouve-t-on écrit. Cela veut dire […] que je dois développer des techniques pour m’exprimer. » Ce qui, tout bien pesé, dit assez la nécessité de pallier la paucité des ressources traditionnelles, même les plus récentes, par l’invention de moyens nouveaux. Ici, le lecteur amolli par la pratique des genres mineurs ou l’exercice des rites en vigueur se dresse, autant qu’il peut, devant la menace d’un nouveau formalisme dont l’ancien n’a pas laissé que de bons souvenirs dans son esprit pizzaïolo. Des années de recherches têtues, auxquelles il n’est pas idiot d’assister (entre autres 7 ou 8 bouquins non moins opiniâtres, sans compter les sorties dans la rue), précèdent cette œuvre non pas anthologique, mais puissamment organisée en poème. Peut-être trop discrètement, car rejeté en annexe, le mode d’emploi de ce livre nous invite à une lecture à la fois intelligente et, j’ose le dire, belle. On ne peut pas être plus clair. Certes, on peut commencer le livre à la première page et en suivre le cours vers l’aval, c’est-à-dire dans le sens chronologique de sa composition (quelques années tout de même), pour à la fin, mais pas tout à fait, se jeter dans ces annexes qui, mieux qu’une explication de texte, nous proposent de comprendre, comprendre en profondeur, du point de vue technique autant qu’artistique, et même éthique, car ce poète hors norme sait vivre ou en tout cas exister. D’ailleurs Mathias Richard confie qu’il n’a pas cherché, en cherchant (et en trouvant), à s’isoler de ses semblables qu’il a plutôt l’air de considérer comme des frères. Publier ce bouquin ne relève pas du défi, mais de l’invitation. Qu’on ait lu ces annexes avant ou après ne change rien à l’affaire : ce type a véritablement pensé. Ceux qui le connaissent depuis longtemps le savent déjà, mais le lecteur qui débarque ici ne met pas les pieds sur une autre planète ; il est chez lui, chez tout le monde, et les textes qui se proposent, qu’ils soient de tête ou de voix, ont tous quelque chose de familier, de si proche qu’il est difficile de ne pas s’y sentir chez soi. C’est que le formalisme en question n’égare pas ; au contraire il rassemble. Et c’est parfaitement réussi. Le lecteur impatient longuement peut consulter le site personnel de Mathias Richard : https://mathias-richard.blogspot.com/ Sa bibliographie en forme d’œuvre : - Musiques de la révolte maudite (Caméras Animales, 2004) Dans l’attente d’une version hypertextuelle de A TRAVERS TOUT (Poetry strikes back)… C’est édité chez Tinbad : 430 pages, 30 euros, avec l’aide à l’édition du Centre National du Livre. Patrick Cintas
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