Un mot me ferait bien plaisir. Savoir. Cesser enfin d’imaginer. Ne plus perdre ce temps. Ici, le ciel s’accroît chaque jour d’une perspective de malheur. Blanc comme l’acier de notre enfance. Ce bonheur ! Ces vacances ! Ivres de l’odeur des troènes avant l’été. Puis l’été. Nous ne savions pas que le temps passait. Nous pensions au contraire qu’il nous était donné pour qu’on en fît le meilleur usage. Le monde s’écroule avec le premier amour. L’existence ne s’annonce plus, elle défile sur l’écran où nous la projetons. Puis, parce que c’est écrit, nous n’avons plus de nouvelles. Personne ne manque pourtant. Jusqu’à ce que le ciel s’empoisonne. Fenêtres toujours ouvertes, rideaux tirés. La poussière et les insectes. Volant et rampant. Et ces traces que nous laissons. Nous nous y reconnaissons. L’eau tisonne la pensée. Et nous nous disions hier soir que nous ne savions plus rien de toi. Pas un signe. Une hypothèse. Rien. Comme si plus rien n’était à démontrer et qu’un mot de toi pouvait servir de démonstration. Nous nous éloignons. Dérive des cœurs. La raison louvoie. Nous ne prenons plus rien à la vie. Elle ne nous donne rien non plus. Chaque jour nous impatientant. Sans blessures. Sans caresses. Traçant des lignes pour relier les objets familiers. Pas d’oiseaux sur les toits de l’attente. Le papillon du soir est aveugle. L’araignée du matin est un filet de voix. Et les heures font des stries. Dessin fugace. Cet éphémère tournoie dans le sommeil. Rêves prémonitoires des funambules. Chaque fois que je me réveille, je suis enfant. Puis je vieillis d’un coup et je deviens toi. C’est toi qui t’endors. Je n’ai pas d’autre réponse. Et je passe beaucoup de temps à me demander ce que peut être la sienne et si je trouverai un jour la force de la lui arracher.