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Manifeste mutantiste - patch 1.2
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 Article publié le 20 mars 2016.

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L’agrégat mutantiste est né en 2007 d’un fort désir d’autre chose.

Il remet en cause les catégories littéraires et artistiques existantes, en propose de nouvelles, souvent hybrides, traversant simultanément plusieurs champs, et forme un nouveau paysage, un nouveau vocabulaire, une nouvelle façon de voir le monde, basée non pas sur le "post-" (l’après, le postmodernisme, la post-Histoire, etc.) mais sur le "pré-", changeant la perspective et nous plaçant dans la préhistoire d’un futur infini.
Il remet aussi en cause la façon dont la distinction et la sélection s’opèrent socialement puisque tout un chacun peut participer et s’approprier le mutantisme s’il/elle en a le désir.
Issu de solitudes coincées au sein d’un environnement techno-scientifique et hypercapitaliste, le mutantisme s’approprie les caractéristiques du machinisme pour le transformer en puissance créative, disruptive et collective.

camerasanimales.com/livre08.html - [Manifeste mutantiste - patch 1.2]
chez Caméras animales - 2016
avec
Nikola Akileus, Zaäk Arandi, Archilux, Nicolas Baudouin, Beurklaid, Volodymyr Bilyk, Serge Cassini, Patrice Cazelles, Alexis Choplain, g.cl4renko, Collectif M.A., Franck Oslo Deauville, Marine Debilly, Sebastian Dicenaire, Jme Gugginø, Marc Hernandez, Hypsis, Lesala, LWO, Méryl Marchetti, Aurélien Marion, Nora Neko, Oxyjenny, See Real, Mathias Richard, Olivier de Sagazan, Xavier Serrano, Christophe Siébert, Yannick Torlini, Annabelle Verhaeghe, Olivier Warzavska.

 

Le Marché de la poésie de Saint-Sulpice est un excellent thermomètre plongé dans le cul de la poésie française contemporaine. Elle s’en porte bien, paraît-il. Grand bien lui fasse cette mesure mercuriale, car c’est l’endroit rêvé pour peser le poids des tendances et surtout des foyers où éclosent et se nourrissent les œufs.

On n’éprouvera aucune difficulté à séparer le grain de l’ivraie : la poésie municipale, simple comme un bonjour, s’évertue à plâtrer les fissures des loisirs culturels ; et l’universitaire, toujours empreinte de mesure, fait battre de l’aile les oiseaux les plus rares.

Mais la poésie se limite-t-elle à la truelle et à l’aile (ou la cuisse) ?

Certes non. Jetez un œil sur ce qui se passe sur la Toile.

Pas mal de types de diffusion littéraire et artistique inondent les réseaux. Notamment :

1) Les projets gouvernementaux, parasitaires et contraints, qui agitent la carotte et le bâton avec la complicité de fonctionnaires zélés. À éviter si on a d’autres chats à fouetter. Mais ces grosses merdes administratives ont évidemment un intérêt documentaire : lieux, personnages, histoires, ateliers d’écriture… tout y est.

2) Les blogs perso, rarement de qualité. Énorme perte de temps. Hélas, car il s’en trouve d’excellents, preuve qu’il faut éviter de s’autoproduire. Les auteurs, bons ou mauvais, conscients de cet écueil, tentent avec plus ou moins de succès d’accrocher leur wagon au train d’une des trois catégories suivantes :

3) Les navets qui diffusent des « notes de lectures » sous prétexte d’information, mais qui ne visent qu’à la publicité. Ils sont accompagnés de trombinoscopes et de forums chargés d’attirer le chaland en se servant de la vanité des auteurs qui s’y produisent.

4) Les véritables sites de création, comme la RALM, où des chantiers sont exposés à la vindicte populaire, à la critique universitaire… Relais des activités personnelles et collectives. Les auteurs publiés dans cet espace sont considérés comme des « machines à écrire. » On ne peut pas parler de collectif ni de mouvement : Robert Vitton a évoqué une ralmway et ses ralminots.

5) Les sites qui témoignent, documents et expériences à l’appui, de l’état de la société actuelle, sans d’ailleurs vraiment se soucier de ce qu’elle a été. Le mutantisme appartient à cette rare catégorie de l’intelligence et de la créativité.

Ceux qui me connaissent savent que j’ai l’habitude (par paresse peut-être) de classer les écrivains en trois catégories :

1) Les écrivains d’œuvres : toute leur littérature (ou texte) repose sur leur existence. Ce sont des êtres en action.

2) Les écrivains de séries : ce sont les écrivains au travail de l’édition, ouvriers de la production.

3) Les écrivains occasionnels : ils occupent plus ou moins judicieusement leurs loisirs à composer, ici et là, quelques livres dont souvent ils espèrent beaucoup.

Je lis Mathias Richard depuis des années. Je possède tous ses livres et je les lis. Ainsi, je suis en mesure de vous l’apprendre si vous ne le savez pas déjà : il s’agit d’une œuvre. Ce qui signifie que M. Richard a mis toute son existence en jeu. Fait rare chez les écrivains qui, d’ordinaire, choisissent de s’inscrire dans une collection alimentaire ou se donnent aux domesticités plus sûrement protégées du chômage et du suicide social qui va avec.

Or, Mathias Richard n’est pas seul. Ce qui m’étonne toujours car moi-même, malgré quelques solides amitiés littéraires, j’habite encore dans ma télévision, seule machine dont je joue sans l’avoir inventée.

Le mutantisme est au moment où je vous parle un « agrégat » de plus de quarante esprits occupant autant de corps (sans compter les schizos). Le résultat de cette composition étrangère aux vices de formation en usage est un manifeste dont un premier état est apparu d’abord sur la Toile, au sein de la maison d’édition Caméras animales. Puis, en 2011, une extension, sous forme de livre papier, a montré comment se forme le mutantisme en une série d’observations d’une pertinence rarement atteinte de nos jours : contexte, « issu de l’hostilité du monde », multiplicité, entre, imaginaire mutantiste, extraterrestre, robot, information, morfojen, machines, conclusion provisoire…

« Le passé, c’est maintenant ! » Autrement dit, nous en sommes à la préhistoire, et non pas dans les périodes dites « post » dont les récentes spéculations nous tartinent l’âme à grands renforts de fausses aventures de l’esprit.

2016 : voici un fameux « patch », le 1.2, au manifeste. La conclusion du précédent opus proposait de « connaître le potentiel » des mutantistes. Voilà qui est fait.

Le manifeste se présente cette fois plus clairement. Nul doute qu’entretemps, ses créateurs, harcelés par les questions (dont « Qu’est-ce que le mutantisme ? ») auxquelles on ne trouvait pas de réponses dans le texte, se sont mis à l’œuvre pour trancher dans le vif. Ceux qui s’entêteront à ne pas comprendre seront désormais considérés comme des crétins ou des hypocrites (ce qui se rapproche d’assez près de la distinction sartrienne pédant/salaud en opposition au philosophe).

Dans une première partie, le manifeste se présente somme toute d’une manière assez classique : genre théorie + pratique. La théorie (qui n’en est pas une ; il s’agit en fait d’un comportement, behaviour) est affinée dans ce qui s’appelle désormais des MODULES. Quant à la pratique, nécessaire en ces temps de disette et de gaspillage poétique, on en retrouvera les chemins dans les MACHINES.

Une deuxième partie, à la manière mutantiste, au lieu de faire exploser la première, en répand les matières en proposant (concrètement) des PLUGINS aux modules et aux machines dont le nombre ne cessent de s’accroître.

Ouvrez ces deux livres au hasard, vous tomberez toujours sur une pensée. Vous n’échapperez pas à la pensée si vous ouvrez ces deux livres.

Alors il est temps de répondre à au moins 3 questions, afin de présenter le Mutantisme le plus synthétiquement possible.

1) Qu’est-ce que le mutantisme ?

2) Comment devient-on mutantiste ?

3) Est-il possible de redevenir ce qu’on a été après être devenu mutantiste ?

 

1) Qu’est-ce que le mutantisme ?

Ne croyez pas vous imprégner d’une réponse, à moins d’avoir une idée de ce que c’est que de s’immoler par le feu après avoir lu un rapport scientifique sur la question. Il n’y a pas moins de 17 définitions du mutantisme dans le Manifeste. Toutes sont rédigées avec un sens de la réalité qui laisse pantois.

S’il s’agit de retrouver le fil de l’inspiration de Mathias Richard et de ses amis, c’est sans doute dans la philosophie qu’il faut chercher la bobine. À mon avis, c’est celle de Descartes (pas celui des jardins à la française qui appartient à l’illusion comique). Le mutantisme refuse les tables rases. Il ne se complaît pas dans le scepticisme et les convictions peuvent provoquer sa colère. Car il faut avancer, créer les conditions du chemin. À cela servent les modules, métamorphoses constantes de l’esprit aux prises avec le monde et ses habitants, et les machines, véritables outils de provocation plus que de création d’ailleurs. On a affaire ici à des acteurs. La découverte est considérée comme un accident. Et du coup, on s’éloigne clairement des joujoux municipaux et des hochets universitaires et ministériels. Car, du côté du module comme de celui de la machine, l’espace s’installe à la place du temps. Dick n’est d’ailleurs pas étranger à ce voyage préhistorique et conscient de l’être parce que « le passé, c’est maintenant ».

Il va de soi qu’avec un pareil arsenal logique et linguistique, le mutantisme est un foyer de création prometteur.

 

2) Comment devient-on mutantiste ?

Il suffit d’utiliser les Comportementales Abstraites Machines, les CAM. Mais le plus difficile n’est pas de devenir mutantiste. Même le conseiller culturel de votre cité peut le devenir. C’est dire…

 

3) Est-il possible de redevenir ce qu’on a été après être devenu mutantiste ?

Ça m’étonnerait… le mutantisme vous a projeté dans l’avenir. Il ne vous propose pas de consommer, mais d’exister. À ma connaissance, on ne revient jamais. Comment voulez-vous ? Votre mémoire peut-elle (raisonnablement) effacer l’avenir ? Vous feriez bien de réfléchir avant de vous décider à manier le module et la machine. Vous n’êtes peut-être pas fait pour ça. Car il faut l’être… mais Mathias Richard ou n’importe quel autre mutantiste dira le contraire si vous agissez dans ce sens.

 

J’ai entendu une fois un poète (petit, petit) prétendre que la poésie est « un mode de vie ». En s’exprimant ainsi, ce poète voulait dire que pour lui la poésie est une œuvre. Sans existence, pas de poésie. Mais si, à la place de l’existence, vous mettez de l’étude ou du loisir, alors ce n’est plus de la poésie. Méfions-nous des poètes qui veulent faire passer les vessies pour des lanternes. La seule lanterne, c’est l’existence. Et c’est sa poésie, conçue comme fonction, application, représentation, que le mutantisme se propose de trouver, de retrouver ou d’inventer… il n’en sait sans doute rien encore. Car au fond, qu’est-ce que le mutantisme, sinon une manière de se comporter honnêtement et sincèrement et non pas en tout bien tout honneur (et respect). C’est dit en exergue : le mutantiste n’est pas adapté. Voilà en quoi il est original et… urgent.

Patrick Cintas.

 

Le Mutantisme est présent (dans ses allées) au salon du livre de Paris.

 

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