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Article publié le 28 janvier 2018. oOo Gérard Haller, « Le grand unique sentiment », Galilée, 2018 Gérard Haller entre trois poèmes et trois peintures recrée uns scène première qui reste l’aventure absolue de soi à l’autre. Un flux étrange circule par aimantation et peur. Ce double rapport reste un des enjeux majeurs du livre où tout ce qui se reflète crée une ivresse particulière ; où l’inerte fait bouger les lignes en ce qui ressemble à un songe, une sortie du temps :
dans sa main d’où passée / là et pas / d’où lancée avant / rien avant / blanc / toile blanche dessous et désir de voir et hop la voilà pomme oui défendue avant / et terre tout entière de nouveau promise qui nous revient / hop / là et pas / nue maintenant oui / portée on dirait par le ciel » Des nuages semblent s’envoler mais à nouveau revienne avant qu’un clair de lune vide l’âme ou la remplisse d’un accord fugace et éternel. Entre l’appartenance, l’apparentement dans ce duo amoureux Haller reste aussi proche du monde de la sensation et de l’émotion. Poétique l’écriture fait entrer dans bien autre chose que la petite mort. L’écriture ici prétend à la réalité et le romantisme n’est pas recevable. L’amour appelée ici n’est pas de l’ordre de la nostalgie, mais de celui d’une remontée des sensations. Les poèmes arrachent à la possession de soi-même et à la stupéfaction de la peur par cet entrée dans le miroir de la nudité qui rappelle à chacun sa propre vie des sens. Est espéré – puis bientôt atteint sans doute - une réponse au fameux "si je suis, qui je suis" de Malone Meurt de Beckett. Haller tord l’amorphie et l’inanité. Les êtres semblent habiter au sein d’un monde qui va se rassemble. L’énergie demeure mais selon d’autres fondamentaux. Derrière le fond poétique et pictural un trouble singulier dans les représentations duales du monde.. L’œuvre vise à la sidération des corps :
bord du temps et s’avançant comme ça au bord nu de l’image ici pour nous montrer. Voici. D’un côté le fond sans fond de l’origine, rien, et de l’autre tout le visible ainsi venant à la surface, immense immense, tout le jardin de nouveau et l’écume et la mêlée jaillissante elle dit des couleurs. Tous les corps oui venant les uns devant les autres comme ça se présenter la lumière de nouveau comme si c’était la première fois » Un hymen est appelé contre l’absence à soi-même. Il est interdit d’interdire dans un texte et des images qui rehaussent la vision des sexes en tant qu’organes. Les corps s’embrasent n laissant derrière eux les vieux pas incertains. L’artiste fait comparaître et parfois con-paraître le sexe comme témoin de la création en un plaidoyer en faveur des existences. L’auteur fait exister le sexe non seulement comme idée mais substance pour rendre « plus » réelle l’existence vaginale ou phallique.
Jean-Paul Gavard-Perret |
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