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Seriatim 3 - [in "Seriatim"]
Seriatim 3 - Petits maîtres tout droit sortis de l’université et des églises (Patrick Cintas)

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 Article publié le 15 novembre 2020.

oOo

Río et Blanco dans un décor.

 

RÍO

(lit)

 

Petits maîtres tout droit sortis

De l’université et des églises

En rang par deux chez l’éditeur

Se disputant les miettes laissées

Par le combat douteux des larbins

La Ville n’est pas devenue une cité.

 

Croissez, oiseaux des tombes !

« Nous attendons l’employé

Municipal : c’est lui qui a

la clé.

 »

Ce matin, ma chérie, j’ai les fleurs.

J’ai le bison séminole et toute la Floride.

Le soleil n’est pas encore debout.

Qui a déposé toute cette rosée ?

Mes espadrilles trempées : « Tu

Ne prends pas assez soin de nous ! »

Sont-ce des dahlias / « je m’en parfume

En lisant l’histoire de ces femmes,

Princesses et courtisanes, amantes

Pour servir de prétexte, ne m’en veux pas ! »

 

L’employé municipal a la clé.

Il arrive dans son auto verte.

Il a déjà un coup dans le nez.

Mais il a la clé, nom de Dieu !

 

Ce matin les fleurs sont mouillées.

Le dallage est sombre, la terre noire,

Il manque une étoile à ce ciel de deuil.

« Je vous ouvre ! »

Parole d’employé.

Il a la clé, ma mie !

C’est l’aube qui le veut !

Bouquets en main,

La lavande du jardin,

Le persil du potager,

« Vous avez vu cet engin ! »

Tonnerre de guerre, tuyère

Rouge traversant le ciel

Encore noir à cette heure.

« Nous allons tous mourir ! »

Vases des nuits de colombe.

Les vieilles fleurs dans la poche.

Les nouvelles caressées comme

Si « elles pouvaient parler » / nous

Sommes au printemps de l’automne.

« Je vous ouvre et je m’en vais. »

Il ouvre et il s’en va. « Revenez

Quand vous voudrez ! » Et au soir,

Nous voilà devant les inscriptions

Séculaires, « nous avons bien travaillé ! »

« Mon Dieu ! Qu’est-ce que ce monde ! »

Froissements des jupes, claquettes des semelles,

« Il va nous arriver quelque chose ! » / MAIS

Rien n’arrive de ce que nous avons souhaité

Ensemble ou dans le secret de nos écrits /

Ellipses et syllepses / fées des siècles passés

/ raison de ne pas rester à la maison

« à attendre que ça recommence »

 

Carthage en feu

Dans ton esprit

/ personnages

Parmi les

Personnages !

 

Ces morts doucement exprimés.

Croix, étoiles et demi-lunes, rien /

Patriotes de la langue plus que de l’écriture.

La fournée de « la main tendue »

Sur le déclin / l’âge n’est pas étranger

À cette dissipation des sources vives.

 

Ce matin je ne sais plus

Si j’habite encore ici

/ avec vous, citoyens

Des sillons, et sans vous

Électeurs des futurs enfants.

 

Ce matin je suis aux Everglades.

Je croise les pélerines amantes

Du bonheur / mais je ne sais plus

Si ma maison est ma maison

Ni si ce que je suis a bien été.

 

Donnez le sein si ça vous chante.

Fumez du gris avec ou sans visions.

Jouez à ne pas jouer pour exister.

Moi, je ne me sens pas d’ici.

Je me mets à parler kinoro.

Je ne peux pas m’en empêcher.

Je salue et même je bavarde,

Mais le cœur n’y est pas, n’y

Est plus / je ne suis plus

un enfant.

Ricky vous salue bien, mes ouailles !

 

Les fleurs tremblent doucement.

La guerre en route vers l’Afrique

Ou l’autan qui lutte contre l’Ouest

d’où vient la pluie.

« Nous venions avec elle

Il n’y a pas si longtemps,

Ô ma voisine en turlututu !

Et les goélettes de mon enfance

Se déposaient avec la neige

Sur tes fleurs toujours vieillissantes.

C’était l’hiver,

Avec ses loups nourris de vent

Ab intestat / « t’as raison mon filou ! »

 

Que chasse le chasseur abstrait ?

Quel est le nom de cette forêt ?

Suis-je né pour la qasida ? Moi

Qui vient de nulle part / avec toi

Et avec la tramontane qui rend fou

Les petits poètes de la Grande Poésie.

 

Tous ensemble avec l’industrie

Guerrière et les vacances promises !

Sur la plage on revoit les films

Qui ont nourri notre adolescence.

« J’ai oublié de quel mot

il s’agissait »

Ailes delta dans la nuit finissante.

Déchirement des airs. Mais bientôt

Nous ne serons plus là pour y penser

Comme nous y pensons aujourd’hui

Car nous n’avons pas d’enfants,

Pas de patrie, pas d’ennemis, rien

Que la musique et cette lenteur

Héritée des meilleurs romans

Que le siècle propose aux poètes

En signe de deuil / « Voici les fleurs

Que j’ai arrachées au talus en venant

Ici pour me souvenir encore de toi »

« J’ai oublié de quel mot il s’agissait »

« Avant j’étais plus proche de la nature »

« Qui a brisé ce vase, nom de Dieu ! »

Voici le vent qui chasse la pluie / le pain

(sur la table) devient dur comme du bois

/ « Veux-tu que nous allions sur la Côte ? »

« Avant, j’étais ouvrier dans le bâtiment »

Lions des cirques sans dompteurs /

« Le malheur est le principe de la reproduction »

Piquant les troupeaux de poètes

Comme à la campagne / la Ville

mon cher

N’est pas la cité dont vous rêviez

En bon architecte de la tranquillité.

 

Ne rêvez plus si vous avez déjà rêvé.

 

« C’est vous qui cuisinez ?

— Ça m’arrive des fois.

I’ll be back un de ces jours.

— Mais d’autres fois, je suis mort ! »

 

Dehors, la rivière s’en prend aux rives.

« Je ne sais pas si je sortirai ce matin…

— Pour aller où ? » / le vent mouche

L’allumette / « Ça sent le kérosène

Comme en vacances / mais c’est pas

Les vacances » / sur le pont on se penche :

Dans la passe les poissons en lutte.

« D’où sort donc toute cette eau ? »

« Avez-vous la clé ? (et ajoute) au moins ? »

Petite ascension du monticule

Où couvent les petits animaux.

« L’année dernière, à cette époque,

Il neigeait (au moins !) — Mais c’est

La neige (ma chérie) cette blancheur

Qui a pris la place de la poésie jadis

Si volubile ! — Ah bon ! Tu crois… ? »

 

Le campanile maintenant.

La même oraison sonore.

Ne veut rien dire mais ça

Tourmente le cervelas

De la poésie Gallimard.

 

Vous êtes déjà venu ici.

Souvenez-vous de l’enfant.

Déjà le plaisir d’exister.

Les jeux sans innocence.

La poésie des éditeurs.

« La mineur, je crois… »

 

Au campanile les pendus

Et les corbeaux, les chairs

En ciel de lit, les putains

Qui font de la vieillesse

Un spectacle pour le peuple.

 

Ce matin, il ne pleut pas.

Mais l’asphalte est mouillé.

L’employé a la clé / ça grince

« sinon ce n’est pas une grille »

Ça ne grinçait pas autrefois.

L’allée laisse filer des rus

Minces comme des fils d’Ariane.

« Vous êtes déjà venu, non ?

On ne vient pas ici sans au moins

Une raison » / C’était avant

de devenir fou !

 

Je reconnais l’allée, les lentes destructions,

Mais le ciment encore frais n’a pas de langage.

Nuit de plomb en phase avec d’autres fusions.

Voici la portion de mur qui s’écroula

Dans nos jambes / « Qui sont ces morts ? »

« Oui ! Vous avez raison (pas fou) sans la clé

Il n’y a plus d’employé et sans lui, la porte

(vous vouliez dire la grille) ne s’ouvre pas »

Sauf esprit d’escalade / puis la fuite au moment

Où un mort s’est mis à parler / Pas le temps

D’écouter ce que disent les morts

Quand on a l’âge de l’enfance !

 

« Il fait jour ? » Pas vraiment.

Rafale à l’exercice de nuit.

La tuyère en feu dans l’interstice

Du volet / « Toi tu sais peut-être

De quoi est fait le Monde !

— Mais j’y étais, ma chère !

Et je peux vous dire que… »

 

SVP, pas de flatterie.

On ne flatte pas la mort.

Or, j’en suis une. Parmi

Les morts de l’université

Et des communes associées.

 

« Qu’est-ce que vous aimez le mieux ? »

 

Je ne sais pas si j’aime.

Mais si c’est possible

I’ll be back wiz you or wizaout !

La route n’a pas été si longue.

Demandez-le aux corbeaux.

Ce matin nous perdons une étoile,

Dit la radio en sourdine sous l’oreiller.

Suffit pas de s’baisser pour la retrouver !

Il sort.

Reste Blanco.

 

 

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