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Quelques entretiens avec Patrick Cintas
Valérie CONSTANTIN

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 Article publié le 14 février 2008.

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Valérie CONSTANTIN
Travailler un texte en profondeur

Tu cites Lewis Carrol qui demandait ce qu’est un livre sans images. Quelle est ta réponse ?

Alice pose cette question… car les enfants aiment cette immédiateté de lecture de l’image. C’est la lecture première, celle qui arrive avant celle des mots. Un livre illustré est ce livre qui se lit avec le regard et qui laisse voguer l’imagination sans effort, sauf celui de se glisser dans un monde déjà dessiné, déjà cadré, imposé en somme. C’est le support de l’écrit, car, lui, demande un effort de lecture, de compréhension, un effort intellectuel, abstrait plus difficile. On imagine mal, en tout cas au jour d’aujourd’hui, un livre pour enfants sans images… d’ailleurs pour les plus grands aussi avec la BD, par exemple.

Par contre, pour le livre de peintre, le problème est très différent. Ce type de livre est plutôt une rencontre entre deux mondes, entre deux écritures, où chacun peut pré-exister. Un dialogue entre le texte et l’image. Un espace de création où les mots de l’écrivain sont le prétexte à un prolongement du travail artistique du peintre. Une rencontre qui peut être faite de complicité, de plaisir, ou au contraire un choc, un combat qui peut être parfois rude et violent. C’est une mise en espace d’un texte, une mise en scène. C’est une œuvre plastique à part entière où le plasticien travaille le rapport entre le fond et la forme, entre le texte et l’image. C’est un duo entre la poésie et la peinture.

Et le livre sans images… c’est celui de l’écriture littéraire, poétique, dont les paragraphes, les phrases, les mots créent l’espace. C’est un lieu où l’imagination, la compréhension ont le champ libre, sans garde-fous qui jalonnent le chemin. C’est le livre classique qu’on lit le plus souvent. C’est la rencontre d’un artiste, de son monde, de ses idées, à l’état brut et de manière abstraite.

Le problème, avec les images, c’est l’influence qu’elles exercent sur le texte. L’auteur du livre n’est-il pas alors l’illustrateur plutôt que l’écrivain ?

Le risque peut-il être tel ?

L’image, par sa lecture immédiate, par sa force, par sa puissance, peut sans doute s’imposer… lors d’une première lecture. Mais je crois que si les mots sont là, de toute manière, on arrive à eux, même si ce n’est pas forcément immédiat. Encore qu’il me semble que l’image ne peut jouer de sa « supériorité », à priori, que dans le cas du livre de peintre ou du livre d’artiste. Sans doute aussi, dans les albums pour les enfants. Car dans ces livres-là, l’image est omniprésente, et laisse très souvent toute petite place aux mots… mais du moment que les mots sont là, ils existent et ils sont lus. Et ces livres proposent deux lectures, la scripturale et la picturale. Ces livres ont alors deux auteurs, l’écrivain et l’illustrateur.

Tu as travaillé avec plusieurs écrivains : Robert Vitton, Marta Cywinska, Patrick Cintas. Comment ça se passe ?

Deux démarches un peu différentes. Marta Cywinska m’a proposé d’illustrer ses deux livres de poésie. Elle m’a envoyé les textes au fur et à mesure. J’ai donc vu naître Astrolabe et Première nudité. Poème après poème, le monde onirique de Marta s’est dessiné. Il m’a habité pendant des mois, jusqu’à ce que je sois capable de dégurgiter quelque chose qui soit proche de ses mots, tout en restant mes mots à moi.

Pour Robert Vitton et Patrick Cintas, c’est moi qui leur ai proposé de travailler sur l’illustration de quelques uns de leurs livres. C’est leur lecture qui m’en a donné envie, qui m’a donné le besoin de soumettre ma version de l’« histoire ».

Avec Marta, c’est un dialogue. C’est comme un morceau de piano joué à quatre mains. On s’écoute, on se réplique… on propose chacune notre réalité, sans jamais entraver celle de l’autre, mais en essayant de les fusionner. C’est un duo.

Avec Robert et Patrick, je propose plutôt une organisation de l’espace avec des images, qui sont censées relayer le texte. Elles ne sont pas asservies au texte, elles sont à côté. C’est ma lecture. C’est ma ré-écriture du texte.

Par exemple, je pense qu’avec Robert et Patrick, les illustrations sont de la même veine que lorsque Matisse (je ne me compare absolument pas à lui…) illustrait un livre. Il apportait une ambiance de lecture. Hormis peut-être pour Le marin de Paris de Robert Vitton et Les enfants n’aiment pas la mort de Patrick Cintas.

Avec Marta, notamment avec Première nudité, je pense à William Blake qui est parvenu à unir si fortement l’image et le texte, que il est presque impossible de voir ou lire l’un sans l’autre.

En prenant en main le projet Dire le texte où écrivains et musiciens proposent leurs interprétations, tu propulses le tout à la fois sur les étalages des librairies et dans les salles des galeries. Peux-tu nous en dire un peu plus ?

Avec ce projet, nous concevons le livre comme une œuvre complète. Dire le texte peut englober à la fois l’écrit, la parole, la musique, la mise en scène, les arts plastiques et la vidéo. Le texte prend alors une toute autre dimension en nous offrant toutes ses lectures possibles, qui peuvent être proposées par le seul écrivain, ou bien par plusieurs intervenants qu’ils soient musiciens, comédiens, danseurs, vidéastes, plasticiens. Cela permet de travailler un texte en profondeur, ses textures, ses rythmes, ses couleurs, ses cris et ses silences, etc. Et cela nous permet de propulser le texte devant un public différent que celui qui entre dans une librairie pour acheter un livre et qui va le lire tranquillement chez lui. Dire le texte, c’est donner une autre dimension à l’écrit. Le livre devient performance et nous offre ses multiples facettes…

C’est toute une réflexion sur les possibles d’un livre.

A quand une exposition de Valérie Constantin ?

Peut-être à l’automne prochain… de grandes toiles… j’y songe et j’y travaille !

 

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