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 Article publié le 24 juillet 2022.

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photo © jean-michel guyot

Prenez un presse-purée, un bulldozer et une mouche

Mettez la mouche dans le bulldozer

Introduisez le bulldozer dans le presse-purée

Peut-être obtiendrez-vous, après de grands efforts,

Une mare de sang jaune

 

Avec un peu de chance - mais il vous faudra atteindre la nuit noire, la nuit sans lune aucune -

Autour de minuit sonnant vous apercevrez une phosphorescence s’allumer à l’horizon,

C’est-à-dire sous votre nez, au ras de vos moustaches, et je sais, monsieur le Comte, que vous les avez longues et bien soyeuses

Il s’agira alors par une opération délicate du sain esprit de vous jeter tout habillé dans la gueule de ce feu jaune

Vous y verrez quelques reflets verdâtres danser à vos côtés avant d’ouvrir grands les yeux sur le mince objet de votre désir, pas plus large qu’un chas d’aiguille

Lutins et farfadets verts comme des sapins de Noël, virevoltant dans une bacchanale, auront une brève existence à vos côtés

De vrais petits éphémères attirés par votre lumière

 

Je serai là en chair et en os, tu verras mes veines bleues palpiter sous ma peau diaphane

A toi de jouer, chéri, fais-moi vibrer à m’en rompre les os, fais-moi danser au-dessus de l’abîme,

Couvre-toi de honte, laisse-moi sombrer dans la fange que tu as préparée pour moi

Je sais que tu m’y attends

Je suis ta chienne dévergondée percée à nu

 

Pompa mortis magis terret quam mors ipsa !

Thomas Mort, le Bien-Nommé, tient le flambeau au-dessus de la tombe de son Roi,

Sa pensée torturante farfouille dans les os pourris de sa Majesté

Thomas, ton jumeau, tu le verras doucement s’éteindre devant toi, puis s’étendre sans une parole, rein de plus qu’une flaque de vomis

A toi de jouer, à toi de reprendre le flambeau !

Tu as le regard coupant comme un rasoir

Je sais que tu le feras

Tu n’as même plus peur de ton ombre

Ombre et lumière

C’est bien la seule dyade qui vaille en ce monde, n’est-ce pas, chéri ?

Tout le saint frusquin, toutes ces conneries d’âme et d’esprit qui s’envolent rejoindre

Le monde des morts, aux chiottes !

Mais l’histoire n’en a pas fini avec toi et les tiens,

Ni avec moi, ta conscience malade, ivre de mort

 

Mais regarde-toi, nous voilà

Souverainement seuls au monde

La pourriture flotte entre nous qui se nourrit de notre infinie séparation

L’intime est cet autel puant qui appelle le couteau du boucher

 

Une mort nous attend sur le fil du rasoir de ton regard sans filet jeté sur tout ce qui est

Lorsque nous plongerons, ce sera seuls, séparés de tous, loin l’un de l’autre

Communauté des amants désossés

Livrés aux flammes sèches de l’oubli

Un pompier pyromane de mes amis se charge de tout

Il y aura, au pied de l’arbre foudroyé, une lanterne magique

Elle n’apparaîtra qu’à ceux et celles qui, comme nous jadis et naguère,

Se destinent à la mort dans des étreintes jamais assez visqueuses

Ils seront peut-être nombreux à venir épancher leur soif

Sur le lieu de notre trépas

 

Nos cendres sur le sol, la lune louche posée sur la plus haute branche du chêne foudroyé,

Voilà le parfait décor pour une orgie suppliciante de plus

Qui n’ajoutera ni ne retranchera rien à ce qui fut, est et sera

 

Dans l’air décomposé, une chanson qui s’ignore

Alexandrine bombine autour des vers de Lou

Un air de déjà vu, une face riante de râteau

Négligemment posé dents vers le ciel obtus

Pour mieux mordre dans les chairs des visages amis

Qu’un pas allègre passe par-là et le tour est joué !

 

Une ronde de joyeux lurons lubriques se forme autour du feu de joie au cœur de l’été brûlant

Ses langues rougeâtres projettent leurs escarbilles parties mourir dans le ciel assaillant de la nuit noire

Escarbilles s’épanchent sans fin, font de la nuit noire le mol écrin de leurs vices

Amants foudroyés, amantes exaspérées sont les flammes et le brasier, les flammèches et les escarbilles

Dans le même temps ouillé par la mort que nous sommes les uns pour les autres

Dans le grand foudre où baigne et barbote le corps déchiqueté de Dionysos

Et comme si ce n’était pas assez

Voilà que la mer violacée s’en mêle, mêlant ses eaux en crue à ces vagues entre les vagues que nous sommes les uns pourris par les autres et vice-versa

 

A l’instant de défaillir

 

Tout écrit, en cela, est posthume,

Tu sais bien

Qu’aimes-tu le plus qui te vient de moi ?

Les poèmes que je t’inspire

Ou bien l’écume à mes lèvres

Lorsque je deviens ta chienne ?

Par-delà bien et mal, nous deux,

Pris ensemble ou séparément !

 

Fermez le ban, l’exil au pays des mots bas peut commencer

Il sera long et subtilement évasif

 

Seul ton corps d’homme, mais pas seulement le tien,

Peut me ramener quelques heures

Aux rives tendres où je fis naguère connaissance

Avec ma vie naissante

 

Diablement sovine,

Je te reluque à n’en plus finir

Vibre en moi ta verge !

Pour toi, mes bras se feront arbres enveloppants

A même le tronc puissant de tes râles pénétrants !

Ne puis mieux faire

A l’instant où je défaille

Ne puis mieux dire

Dans la fatal attrait

De l’après

 

Jean-Michel Guyot

19 juillet 2022

 

 

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