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![]() oOo Certains artistes participent de la médiocrité ambiante, tandis que leur public participe à la médiocrité généralisée ; sa responsabilité n’en est pas moindre. Mettre la barre toujours plus haut ? Certes, non ! La barre n’est ni très haut ni très bas, elle fluctue, elle est floue, verschwommen : noyée dans la médiocrité ambiante. Menacée de dissolution à chaque décision ministérielle, à chaque spectacle désolant de bêtise, à chaque concert de variété. C’est le nombre qui fait la Loi ; quantité mute en qualité, c’est bien connu, dès lors qu’elle exerce un effet de masse suffisamment puissant pour non seulement envahir peu ou prou tous les écrans, tous les spectacles vivants et toutes les salles de concerts mais aussi peser sur les consciences abruties qui ne désirent plus qu’une chose : se voir en plus grand dans le miroir complaisamment tendu, et ainsi rêver par procuration à plus grand que la médiocrité hagarde dans laquelle elles baignent quotidiennement, pimentée-ponctuée par de petites et de grandes humiliations infligées par les petits et les grands chefs sur leurs lieux de travail. Conscience est un grand mot, en l’occurrence. Au risque du désir. Parier sur l’avenir, c’est miser sur une génération nouvelle de créatrices et de créateurs sans autrement se préoccuper des conditions matérielles et de la formation intellectuelle de ces nouvelles générations. Rentrer dans le rang, fermer sa gueule, bosser, consommer et crever, voilà l’horizon de la grande masse. Le fantasme aristocratique est le pendant du misérabilisme ambiant, de l’égalitarisme souriant qui prône une égalité des droits de pure façade, tandis que les conditions de la vie matérielle, qui seules comptent pour qu’apparaissent et s’affirment des talents puissants divers et variés, sont quantité négligeable dans le grand calcul du capitalisme financier. On tient les gens par les produits de consommation qui flattent le bas narcissisme ; la classe ouvrière est perdue pour la Révolution, alors on cherche d’autres voix à représenter pour avancer. On jongle avec des mesures sociétales en négligeant les questions économiques, sociales et environnementales. Peu importe que les gens vivent mal dans des logements pourris, peu importe qu’ils sautent des repas, peu importe que leurs enfants reçoivent une instruction bas de gamme, tant qu’ils ferment leur gueule, achètent des smartphones et s’abrutissent devant leurs écrans. Tout se vend, illusions comprises ; s’il n’y avait pas de consommateurs de drogues, il n’y aurait pas de trafic. Qu’est-ce qui pousse donc les gens à s’adonner à des paradis artificiels aussi minables ? Voilà la question qui n’est jamais posée sur la table. Les trafiquants, à tous les échelons, sont des capitalistes sauvages au même titre que la racaille financière sans foi ni loi. Il y a une revanche à prendre, se disent les professions intellectuelles méprisées par la Finance, la « haute fonction publique » et les politichiens, mais aussi par les petits bourgeois. Mais que pèsent-elles face aux maffieux, aux financiers et aux politichiens ? Ce ne sont que des arlequins réduits à faire joli dans le tableau. Des toutous empanachés qui aboient quand la caravane passe. Dès lors qu’une classe sociale n’a plus d’utilité claire, elle doit disparaître ; son autorité est contestée puis balayée. Elle n’inspire plus ce mélange de respect et de crainte, elle n’inspire plus que le mépris. Elle est vouée à disparaître dans une mort violente. Le lien entre la grande création et les masses ne s’est jamais réalisé. La grande création n’infuse pas, n’inspire pas parce qu’elle est inaccessible au grand nombre. Deux renoncements conjuguent leurs effets : la grande création, tout le monde s’en fout et les conditions de la vie matérielle, le capitalisme financier s’en moque comme d’une guigne. Seule une misère noire, généralisée pourrait conduire à une explosion révolutionnaire décisive. Resterait alors à mettre d’accord des gens aux confessions et aux convictions si diverses et si antagoniques, que le projet paraît purement et simplement impossible à réaliser, sauf à retomber dans les ornières révolutionnaires du passé. Tous les chemins mènent à la tyrannie, dès lors que ne s’élèvent pas des voix assez puissantes pour dire merde à la Finance. Il n’y a que des opinions tranchées, parfois tranchantes et personne pour mettre tout le monde d’accord hormis le Souverain, représentant de dieu sur Terre. Mon cul ! Plutôt crever !
Jean-Michel Guyot 3 octobre 2023 |
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Commentaires :
Ni très haut ni très bas... https://youtu.be/tVX2tRyFEos?si=_ACQrsIdniOBZ8R_
Ce texte est un vrai coup de gueule, un pamphlet à la fois brutal et désespéré sur l’état de la société, de l’art et de la pensée critique. L’auteur y dénonce une médiocrité généralisée, où les artistes, le public et les élites sont tous piégés dans un système qui écrase la culture et la réflexion au profit de la consommation et du profit.
Un regard noir sur la société
Jean-Michel Guyot ne mâche pas ses mots : il voit un monde où la finance et le capitalisme ont tout dévoré, où l’art n’est plus qu’un produit bas de gamme destiné à flatter l’égo des masses, et où les intellectuels ne sont plus que des figurants sans pouvoir. Il critique aussi l’illusion d’égalité et les discours creux sur la démocratie, qui cachent en réalité une précarité toujours plus grande.
Il va encore plus loin en affirmant que la révolution, pourtant nécessaire, est devenue impossible : les gens sont trop divisés, trop englués dans leur quotidien, et ceux qui pourraient changer les choses n’ont plus d’influence. Il ne reste alors qu’un horizon sinistre : la soumission ou le chaos.
Un style tranchant et violent
Ce qui frappe dans ce texte, c’est la force de la langue. L’auteur ne cherche pas à adoucir son propos : il balance des phrases courtes et incisives, utilise beaucoup de sarcasme et de formules chocs. On sent l’urgence, l’exaspération, presque une forme de rage contenue.
Les images qu’il emploie sont marquantes : la société décrite ressemble à une immense machine à broyer les esprits, où les gens « ferment leur gueule, bossent, consomment et crèvent ». Il y a un vrai côté pamphlétaire, qui rappelle un peu Céline ou même Houellebecq dans ses moments les plus acerbes.
Un texte qui dérange et secoue
On peut être d’accord ou non avec ce qu’il dit, mais impossible de rester indifférent. C’est un texte qui frappe fort, qui exprime une colère brute, presque nihiliste. Il n’offre aucune issue, aucun espoir, juste un constat amer sur un monde qui tourne en rond.