L’unique dieu

et non seulement le dieu unique de la tradition abrahamique, mais tous les dieux que la Terre a portés dans le cœur et l’esprit des hommes de tous les temps

partagé par tous sous divers noms

unique dans le moment de son adoration ritualisée - rites, offrandes, prières -

mais le plus souvent un parmi d’autres au sein d’un « panthéon » (On me pardonnera mon gréco-centrisme !)

comment en est-il venu à inspirer tant d’œuvres au cours des siècles ?

 

nommé toujours, par-là sommé de se manifester à défaut de se montrer sous son meilleur ou son pire jour

somme de prières et de commentaires

où son nom est nommé

en pure perte

somme de commentaires

accordés aux humeurs et aux rumeurs d’une époque

 

se manifestant un et multiple simultanément

un par son nom

multiple dans ses manifestations unifiées dans un corpus de textes sacrés

lesquels appellent des commentaires multiples indéfiniment

 

einzigartig, unique en son genre

mais nullement einzig, unique

 

à l’image des œuvres

qu’il a soi-disant inspirées

qui, bien plutôt, se sont inspirées de « lui »

figure énigmatique finement commentée

figure rassemblée sous le dôme d’un ensemble de dogmes

comme la mer en ruines toujours se renouvelant

construite-déconstruite

dénuée de toute intention

recueil de tant d’intentions

par les fleuves et les ruisseaux, les rivières et les torrents manifestées

 

luisant dans sa nuit, nuisant pour ainsi le dire

à la pleine lumière du jour

qui se passe de son nom

en passe encore et encore par lui

toujours lui, luisant dans sa nuit

nuisant à son plein jour

 

Œuvres alors en hommage à ce jour qui se dérobe à soi-même

double énigme pour les hommes ne sachant qui ils sont

s’adressant à qui n’est rien que le nom

de ce qu’ils ignorent d’eux et du monde

 

Jean-Michel Guyot

13 mars 2024