« Un jour, il ferma sa porte définitivement. Si ! Si ! C’était définitif. Enfin... pour toujours. Ce toujours qui a une fin. Je montais et descendais tous les jours, m’interrogeant devant sa porte. N’osant appeler, alors que nous nous connaissions depuis toujours. Ce toujours... Et à mon tour je m’enfermais, mais seulement pour la nuit, avec quelqu’un. Il y a toujours quelqu’un près de moi. Il y a toujours eu quelqu’un. Quelqu’un de toujours... de jamais... quelquefois. Mais je n’ai pas l’intention d’aller plus loin avec vous. Je vous connais si peu ! D’hier ? dites-vous. Je revenais... Je reviens toujours quand ça arrive. C’est ça la poésie. Vous ne pouvez pas comprendre. Me comprendre. Comprendre que toujours... jamais... quelquefois... Hier ? Cela me semble si loin. C’est toujours... Ne me parlez plus. Je pense à lui, en effet. J’allais dire : évidemment. C’est encore... Cette porte que j’ai ouverte si souvent, toujours... Nous nous parlions. Comme vous et moi. Mais depuis plus longtemps qu’hier. Chaque fois franchissant cette distance de jours. Nous nous comprenions. Je crois maintenant que nous choisissions ces moments en même temps, vous savez : revenant après une dure journée, y pensant dans le métro et se retrouvant au bas de l’escalier à la fois surpris et avisés, prêts à remonter chacun à son étage, nous arrêtant devant sa porte et lui me proposant de l’ouvrir pour que nous puissions continuer de nous entendre. Cette fenêtre est notre témoin. Avec quel soin il continue d’entretenir ses géraniums, nos géraniums, car il faut que je vous confie que... »
Lui, moi, ces gens que je croise plusieurs fois par jour parce que je ne m’en vais pas. Ce matin une voiture a failli me renverser, là, où nous sommes vous et moi en ce moment. Voyez comme j’y reviens avec délectation ! Je vous aime à ce point.