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 Article publié le 23 février 2014.

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J’invente ! J’invente ! J’invente !
Mes vers, jadis, vous les vantiez.
Mes trouvailles vous épouvantent,
Ne parlons pas de mes chantiers.

C’est la Poésie qu’on enferre,
Dans ce vieux monde abasourdi
Où tout semble à faire, à refaire,
Où tout semble avoir été dit.

Je raffole des jeux, des joutes,
Des jus, des jongleries de mots,
Comme un écolier, j’en rajoute
Dans les buissons sous les rameaux.

Mais que voulez vous que j’y fasse,
J’appelle un trognon un trognon,
Cachez vous la fesse et la face,
Ma farce enjoue mes compagnons.

Mauvaises herbes toujours croissent !
Ce sont paroles de rupins.
Mes ribouis sont de deux paroisses,
Je me nippe chez Richepin.

Je n’entre pas dans les chenilles
Ni dans les rondes des fêtards. 
Sous les cailloux, je décanille,
Traité de traître et de bâtard.

Je suis à la rime, à la rame,
Dans ma galère ivre au long cours.
Je me mêle des mélodrames
Et je guimbarde dans les cours.

Ma muse, ô mon âme vannée,
Tu gagnes des mille et des cents
Ou de quoi vivre une journée,
Selon le bon cœur des passants.

Je suis en mal de Malvoisie,
Je m’en reverse à ras de bord,
Je m’en passe la fantaisie,
Je parle à mon vieux tapabor.

Et si je m’allais mettre en bière,
Boire sans soif dans un caveau
Aux Amours jaunes de Corbière,
A la barbe de mes rivaux.

J’en ai siroté de la verte
Aux vers du gâs Gaston Couté.
Que de fois mort, la gueule ouverte,
Les pintes ne m’ont rien coûté.

Mes habits sont à la lessive,
Je reviens à mes charabias.
J’ai pris des coups dans les gencives,
Dans les côtes, dans les tibias.

Garçonne, apporte des bocks d’ale,
De quoi me dessaler le bec,
Des quignons, de la mortadelle !
Mon ventre est creux comme un rebec.

Je m’endors sur des coins de table,
Dans des endroits peu reluisants.
Mon égérie n’est plus sortable,
Nous nous tannons, trimard faisant.

Pouah ! Garce, c’est du pissat d’âne !
Tout sent le rance, le gâté.
Rapplique avant je me damne
Et que je perde ma gaîté !

Ma fée, ma Garde de la manche,
Mon ange, mon couteau pendant,
Mon féal prennent leur dimanche
Quand mon chien leur montre les dents.

J’entends pester ma pauvre mère,
Couvre ton crâne et tes rognons.
Moi, j’enfourchais mille chimères,
Pieds nus, en pelure d’oignon.

Je fleuris ma littérature
De bons mots sitôt morts que nés.
Je vois des champs pleins de ratures
Et des horizons griffonnés.

Sur les pas tâtonnés d’Homère,
Que de nuits d’encre de chemin !
Je croise des fous qui rimèrent
Sur les voies, sur les parchemins.

C’est ainsi, la Mort nous agrippe,
Dans le passé, point le futur.
Tant que je ne vois pas mes tripes,
Pourquoi m’inquièterais-je, Arthur ?

Quand je suis à cours d’idées noires
Et que je n’ai plus qu’un quartier
De lune dans ma comprenoire,
Je me remets sur le métier.

Robert VITTON, 2013

 

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