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Le branle de la sortie
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 Article publié le 2 mars 2014.

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Je bois l’encre jusqu’à la lie,
L’encre noire des caniveaux.
Je vois des façons de chevaux.
En attendant une embellie,
Je mêle à ma mélancolie
Des lampées de rouquin nouveau.

Quand je n’aurai plus rien à frire,
A fricasser -pas même un œuf-,
Quand je n’aurai plus rien de neuf
A débagouler, à écrire,
A bâcler, je mourrai de rire
Dans les rues de Quatre-vingt-neuf.

Mes égéries me reverdissent
En déballant mes souvenirs.
Courir, courir ? Plutôt tenir !
Toutes mes pensées rebondissent.
Tâter, retâter aux blandices…
C’est fatiguant de rajeunir.

Mes idées sont toujours mettables.
Vous aurez les points sur les I,
Nicodèmes en cramoisi.
Je frappe du poing sur la table.
Vous m’en voulez ? C’est regrettable,
Je ne suis pas encore moisi.

L’on farfouille dans mes affaires,
L’on éparpille mes papiers,
L’on fauche l’herbe sous mes pieds,
L’on me muselle et l’on me ferre,
L’on ne songe qu’à me défaire,
Qu’à me fourrer dans un guêpier.

J’en suis à mes dernières mailles,
On me laure sous les cyprès.
Je sens la Mort un peu plus près,
Je passe à côté des chamailles,
Je n’ai plus un fredon qui m’aille,
Qu’enfin je parte sans apprêt.

Que ma péripatéticienne,
De plume tourne autour des pots,
Des dépotoirs, des entrepôts,
Des tripots, et trime à l’ancienne. 
J’ai mes raisons, elle a les siennes.
Nous échangeons d’amers propos.

Que voulez vous que je vous dise ?
Je prends le temps de vivre un peu,
De flûter des airs sirupeux,
De détailler ma marchandise,
De me gaver de friandises
L’on roule sa vie comme on peut.

Mais que voulez-vous que j’y fasse
Si vous me croyez démodé,
Au bout de ma gamme, échaudé ?
Voudriez-vous que je m’efface,
Que je m’en tienne au pile ou face, 
Au court fétu, au coup de dé ?

Voulez-vous que je me repente
D’entonner des refrains gaillards,
D’être un tant soit peu débrouillard,
D’avoir une avaloire en pente,
A toutes les heures tapantes
D’être dans un colin-maillard,

D’avoir des compagnons de route
Dans mon paysage hiémal,
Sans dieu ni maître, un animal,
Qui lappe, qui croque ou qui broute,
Des créatures qui froufroutent,
Quelqu’un qui écoute mon mal !

A ces sentences que j’énonce,
A mes envies, à mes hochets,
A tous mes tirs à ricochet,
Vous voudriez que j’y renonce,
Que je ne vaille plus qu’une once,
Que je jure sous les archets ?

Au long aller, le passé pèse
Avec ses cadavres exquis.
Dans nos déserts, dans nos maquis,
Pour que l’ensuaireuse apaise
Nos soifs, nos faims et nous empèse,
On a toujours l’âge requis.

Robert VITTON, 2013

 

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